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Quand la consommation d’alcool chez les jeunes oscille entre plaisir et risque de dépravation sociale

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Au milieu d’une crise socio-économique sans fin, entre l’insécurité grandissante et le stress quotidien, les rares moments de célébration et l’incontournable influence des slogans des DJ dans la vie et les mœurs urbains, l’alcool coule à flots. Et le refrain, « Parese leve pou w bwè kleren » n’est pas, semble-t-il, sans conséquence. Source de plaisir et de détente, instrument de célébration et objet culte des soirées animées, la consommation d’alcool, exhibée telle une propagande, présente aussi des risques pour l’éducation de la jeunesse d’aujourd’hui.

« Personnellement, moi j’aime boire de la bière, du whisky ou du rhum dans des moments de festivités, quand je célèbre quelque chose ou bien dans des moments de détente entre amis », affirme Mackendy un jeune comptable à l’administration publique. « L’alcool, pris avec modération, permet de se détendre, de mieux s’évader par rapport au stress quotidien, aux mauvaises nouvelles, etc. », avoue-t-il. Un besoin peut-être bien justifié, compte tenu des dures réalités auxquelles toute la société haïtienne aujourd’hui est confrontée et la jeunesse en toute première ligne.

« Si tu ne te détends pas, tu vas faire quoi ? », interroge Louise-Marie, une étudiante en linguistique âgée de 22 ans.  « Avec ce qui se passe de nos jours, c’est le seul moyen de détente qui nous reste de toutes façons », lâche-t-elle. « L’alcool c’est un délice, pour moi, il n’y a pas mieux. Je ne veux troquer mon verre contre rien d’autre, pas même contre un jus de fruit. L’alcool, c’est tout simplement différent !», s’exclame-t-elle.

Ainsi pour tenter d’échapper à la pression énorme qu’est devenu le simple fait d’exister en Haïti, pour les jeunes de nos jours, boire est peut-être une réponse. Une réponse qui comporte bien de risques tant sur le plan pratique, sanitaire qu’éducatif: «  Le coma éthylique, beaucoup le frôlent souvent sans le savoir », indique Esther en parlant des grands buveurs. « C’est une fierté de dire que l’on peut avaler une demi-caisse de bière, mais les risques sanitaires il faut savoir les gérer aussi », prévient-elle.

Pour ce qui est des risques liées à la consommation d’alcool,  Gustave, 26 ans, déplore le fait que les compagnies propriétaires de grandes marques de boisson n’insistent pas assez sur l’(in)formation de leur clientèle juvénile. « Elles ne font pas d’exception pour les mineurs, dit-il, dans leurs publicités, et essaient même de cacher le plus possible la mention ‘’Vente interdite aux mineurs‘’ sur les bouteilles ». Le résultat est qu’un nombre incontrôlé de ces jeunes en dessous de la maturité consomment de l’alcool dans des soirées animées, dites « pwogram ». Une situation confortée en plus par les célèbres DJ dont l’influence sur la mentalité de ces jeunes à travers des slogans populaires est assez considérable.

« Parese leve pou w bwè kleren »,  est cette musique tube de  Bmixx et Afriken, deux Disk Jockey (DJ) très connus dans le  milieu musical haïtien qui tend à faire écho au sein des jeunes de la société haïtienne avec un refrain entraînant, avec les mêmes mots en créole. Pour Mackendy, « quand on fait la fête il n’y a pas de plus beau slogan, c’est vraiment fun », tout en reconnaissant que cela « peut aussi avoir un impact négatif sur de plus jeunes personnes ». D’autres avouent, comme Esther : «  C’est à la fois amusant et déplorable. C’est comme si dans l’imaginaire de la jeunesse, boire pouvait être un travail à plein temps ! Pour moi, ça montre la mentalité du peuple, et c’est très bas, il faut l’avouer ».

Consommer de l’alcool n’est donc plus un tabou dans la société d’aujourd’hui, au point qu’on en oublie les anciens qualificatifs (kaka kleren oswa bwesonyè). Les jeunes de cette société en crise, mal encadrés et inquiets pour leur avenir comme pour leur présent, semblent trouver, en cédant à la facilité, une échappatoire qui pourrait avoir des conséquences négatives à l’avenir.

Daniel Toussaint

danieldavistouss@gmail.com

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