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Réajustement de salaire : Les ouvriers du textile obligés de regagner les rues

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Face à l’inflation qui explose à tous les niveaux et une insécurité qui limite au maximum tous les efforts, la vie devient pénible pour les ouvriers du secteur textile. Disant ne plus pouvoir supporter la vie avec 685 gourdes, ils descendent dans les rues, et demandent une augmentation de leurs salaires et de meilleures conditions de travail. 

Après les mouvements de février 2022, les ouvriers repartent une fois de plus cette année à l’offensive pour exiger du Conseil Supérieur des Salaires (CSS) qu’il respecte la loi sur les salaires minima. Depuis la loi de 2009 sur le salaire minimum, il est demandé que le CSS se réunisse « trois mois avant la fin de chaque exercice fiscal afin de réviser, s’il y a lieu, le salaire minimum en fonction des indices macroéconomiques ». Cependant, chaque année, ce n’est qu’à coup de manifestations et de grèves que les ouvriers de différentes entreprises industrielles, commerciales, et autres tentent de réveiller ce conseil composé à la fois de représentants du Ministère des Affaires Sociales et du Travail (MAST), du secteur patronal et des ouvriers. 

« Chaque année, nous sommes obligés de manifester sous la répression pour qu’ils crachent sur le salaire minimum. Et quelques jours plus tard, toujours on entend dire que l’inflation est à la hausse pour ravaler nos efforts », scandait une ouvrière manifestant ce 9 mai 2023 pour une nouvelle grille salariale. En effet, trois journées de manifestations ont été organisées les 8, 9 et 10 mai par des ouvriers du textile à Delmas, réclamant une augmentation salaire à 2 500 gourdes par jour, de meilleures conditions de travail ainsi que la réintégration des ouvriers mis en disponibilité. 

« Nous ne pouvons même pas nous nourrir avec 685 gourdes »

La vie ne cesse de devenir chaque jour plus chère en Haïti dans une conjoncture dominée par l’instabilité politique, les crises institutionnelles et la prolifération des gangs armés et l’insécurité alimentaire. « Tel que prévu dans l’analyse de septembre 2022, la forte inflation, alimentée par la dépréciation du taux de change de la gourde par rapport au dollar et par la hausse du coût des transports, ainsi que le climat sécuritaire délétère, continuent de réduire le pouvoir d’achat des ménages les plus pauvres qui sont obligés de recourir à des stratégies de moyens d’existence non soutenables », avait expliqué la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA) dans son « Analyse de l’IPC de l’insécurité alimentaire aiguë Mars-Juin 2023 », publiée le 23 mars dernier. 

Selon les ouvriers qui manifestaient cette semaine, il est difficile de se nourrir avec la grille salariale actuelle. « Nous demandons un salaire minimum décent. 685 gourdes par jour ne peuvent plus rien pour nous. Un plat chaud à l’usine coûte 400 gourdes, un jus est à 150 gourdes. Réfléchissez, et voyez combien ça fait », a scandé un ouvrier en colère devant les micros de la presse mardi.

Les ouvriers estiment mériter, comme les travailleurs de certains autres secteurs, une carte de débit avec d’autres avantages sociaux de l’Office National d’Assurance-Vieillesse (ONA). Selon eux, ils travaillent, cotisent, mais ce sont d’autres plus aisés qui en bénéficient. « Nous demandons à l’État de meilleures conditions de travail, pour que, quand les patrons font des prélèvements sur nos salaires, ils les versent réellement à l’ONA, à l’OFATMA ». « Nous travaillons, nous payons nos cotisations, mais ce sont les plus riches qui bénéficient de prêts sur notre courage », a déclaré un protestataire. « Il y a l’ONA pour les sénateurs. Il y a l’ONA pour les députés. Mais il n’y a pas l’ONA pour les ouvriers », a ajouté une autre ouvrière en colère.

Ces trois journées de manifestations se seraient toutefois déroulées sans grands incidents sans la dispersion des manifestations par les policiers à coup de balles en caoutchouc et des jets de gaz lacrymogène quand les protestataires ont voulu manifester devant l’ONA, ou se rendre à la résidence officielle du Premier Ministre Ariel Henry. Par ailleurs, une manifestante a été blessée à la tête par une grenade de gaz lacrymogène, fait imputé à la police par les manifestants. « À coups de balles et de gaz lacrymogène, ils nous ont maltraités. Une camarade a été blessée », s’est indigné un manifestant, avant d’ajouter qu’ils comptent porter plainte à l’Inspection Générale de la Police Nationale. Pour ces ouvriers, pas question de laisser tomber, ils entendent poursuivre leur mobilisation jusqu’à ce qu’ils obtiennent satisfaction. 

D’un autre côté, d’autres secteurs entendent organiser une grande journée de mobilisation anti-gouvernementale pour le 18 mai à venir à l’occasion de la fête du drapeau, pour protester contre l’insécurité, la vie chère et l’inaction du Gouvernement. Pour sa part, le Gouvernement bat une fois de plus en retraite face aux gangs armés, la traditionnelle cérémonie pour la fête du drapeau n’aura pas lieu à l’Arcahaie, mais au Cap-Haïtien en raison de la violence des gangs dans la cité du drapeau. 

Clovesky André-Gérald PIERRE

cloveskypierre1@gmail.com

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