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106 années après le débarquement des Américains en Haïti, la situation n’a pas changé d’un iota, estime Michel Soucar

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Dans un langage clair, l’historien Michel Soucar  a expliqué la manière dont les Américains avaient fini par  occuper le territoire haïtien, le 28 juillet 1915. Plus d’un siècle après, rien n’a changé dans l’histoire d’Haïti. La paupérisation et la prolifération des gangs armés sont  deux  facteurs que l’écrivain considère comme  des évidences de la descente aux enfers d’Haïti.  Retour sur cet événement du XXème siècle.

Selon l’historien Michel Soucar, la situation d’Haïti à la veille de 1915 était comparable à celle  d’aujourd’hui où l’on assiste  depuis quelques temps à la forme la plus simple de  l’effondrement de l’État. De fait, une multitude de présidents se sont succédé au pouvoir en très peu  de temps: Tancrède Auguste, Michel Oreste, Oreste Zamor, Davilmar Théodore, pour ne citer que ces noms-là.

La pression américaine, une constante dans l’histoire d’Haïti

Au début du vingtième siècle, il fallait asseoir l’économie capitaliste extrêmement puissante à travers la  doctrine de Monroe (l’Amérique aux Américains). C’est ainsi qu’on a fini par combattre les Allemands et les Français qui luttaient pour étendre leur suprématie en Amérique, d’après les explications du dramaturge.

Les États-Unis ont profité des turbulences politiques qui prévalaient en Haïti pour contrôler les finances du pays, notamment au niveau de la douane (institution stratégique de l’État). C’est ainsi qu’ils avaient fini par bénéficier de la complicité de certains Chefs d’État, comme Vilbrun Guillaume Sam.

Entre-temps, dans le Nord du pays, selon les précisions du  professeur Michel Soucar, les Cacos , ayant à leur tête un leader dénommé Rosalvo BoBo se sont soulevés  contre Vilbrun Guillaume Sam qui, parvenu au pouvoir, a orchestré toute une série d’arrestations arbitraires. Les Américains ont fini par réussi à neutraliser Rosalvo BoBo, une tête pensante qui luttait contre l’impérialisme de l’époque.

D’autres militants ont été également arrêtés. Dans l’intervalle, un véritable  massacre a eu lieu dans la prison civile de Port-au-Prince sous les auspices de Charles Oscar Étienne. Ce dernier, par la suite rattrapé dans les locaux de l’ambassade de la République Dominicaine, a été tué dans les rues de Port-au-Prince en guise de représailles.

Au cours de cette incursion dans l’histoire, l’essayiste a indiqué que les opposants au régime, qui étaient pour la grande majorité des Cacos, ont lancé une attaque contre le Palais national en vue de s’emparer de Vilbrun Guillaume Sam, qui a eu le temps de se réfugier à l’ambassade de France à Port-au-Prince.

Accusé d’être le principal instigateur du massacre des prisonniers, les Cacos qui n’avaient pas baissé les armes ont fait irruption dans les locaux de l’ambassade de France tuant du même coup le président Sam, avant de traîner son cadavre à travers les rues de la capitale, le 28 juillet 1915.

Selon ce que nous explique l’historien dans cette interview accordée à Magic 9, un peu plus tard, un bateau de guerre  américain qui se trouvait dans la rade du Cap Haïtien, piloté  par le général William Amiral Caperton, a pris la direction de Port-au-Prince. Ce fut alors  le débarquement qui a débouché sur l’occupation américaine.

Plus d’un siècle après, le constat est implacable

« Les politiques de nos jours ne connaissent pas l’histoire du pays »,  plaint le professeur Soucar, estimant que le plus grand problème du pays aujourd’hui réside dans un refus du savoir. « Nous avons aujourd’hui une amplification du trafic de la drogue, Haïti est un lieu de transit pour la cocaïne », a-t-il déploré.

Michel Soucar a également  évoqué la complicité de la communauté internationale dans la détérioration de la vie socioéconomique et politique d’Haïti. La paupérisation de la population et la prolifération des gangs armés sont autant de facteurs qu’il considère comme étant des évidences de la descente aux enfers d’Haïti.

Pour redresser la barre, il faut redonner confiance aux Haïtiens qui perdent total espoir aujourd’hui. Son espoir est qu’Haïti puisse redevenir  un territoire attractif comme par le passé.

« Aujourd’hui, il s’avère incontournable de s’unir pour reconstituer un groupe homogène, sachant que le pays a des ennemis », soutient l’écrivain. Sans vouloir être un oiseau de mauvais augure, Michel Soucar prévient contre une accélération de l’insécurité dans le pays. Une situation que l’écrivain a dénoncée.

Suite à l’appel de l’ancien Premier Ministre a.i. Claude Joseph demandant à la Maison Blanche d’envoyer des troupes américaines dans le pays, des observateurs qui analysent de près la situation  estiment que le pays est tout proche d’une énième occupation qui pourrait même dépasser en durée celle de 1915 à 1934.

Mario Sylvain

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