Les violences exercées par les gangs armés ont entraîné plus de 42 500 déplacés internes depuis le 14 février, dont 50% à Delmas et 44% à Port-au-Prince. C’est ce qu’a fait savoir l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Les gangs armés ne cessent de gagner en puissance. Ils continuent en toute quiétude d’esprit d’assiéger plusieurs régions dans la capitale haïtienne sous l’œil de la Police Nationale d’Haïti, du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) et du gouvernement. À la rue Cameau, Lafleur Ducheine et à l’Avenue Christophe, les artisans de la violence ont forcé des centaines de familles à fuir leur demeure.
À en croire les données recueillies par l’OIM, au moins 42 538 personnes ont été obligées de fuir leur domicile en vue d’échapper à la terreur des gangs armés dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince. Selon l’OIM, la moitié de ces personnes se trouvent dans la commune de Delmas alors que 44% sont recensées dans la circonscription de Port-au-Prince. Il s’agit des déplacements les plus massifs enregistrés dans la zone métropolitaine depuis 2021, affirme l’Organisation internationale de la migration.
Lutte contre l’insécurité : de nouvelles stratégies s’imposent
Les forces de l’ordre peinent à neutraliser ceux qui sèment la terreur à Port-au-Prince. Les stratégies visant à traquer les gangs armés demeurent encore infructueuses. James Boyard, enseignant-chercheur à l’Université d’État d’Haïti (UEH) estime que « le moment est favorable pour procéder à des opérations Pied/Sol massives ». M. Boyard souligne que la stratégie d’incendie des maisons par les gangs est liée au fait qu’ils cherchent à faire l’économie du peu de munitions qu’il leur reste. « On n’a pas intérêt à leur accorder du temps pour s’approvisionner », a-t-il soutenu sur son compte X le 15 mars 2025.
L’installation de la CNDDR : un pas en avant dans la lutte contre l’insécurité ?
Le titulaire du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales (MICT), Paul Antoine Bien-Aimé, sur les instructions du Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé, a procédé dans la matinée du 10 mars 2025, à l’installation de la Commission Nationale de Désarmement, Démantèlement et de Réintégration (CNDDR) dans les locaux de l’Unité de coordination des projets du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales (MICT).
Composée du coordonnateur Enold Florestal, des membres Guerda Prévilon, Claudy Alexis, Junior Bonheur, Illionor Louis, Michel Jean-Marie Léonidas, Abler Roudy Lalanne, cette nouvelle commission de la CNDDR a été nommée par arrêté lors du Conseil des ministres en date du 21 février 2025.
Lors de son discours de circonstance, le responsable du MICT a fait savoir que la mise en place de la CNDDR est un signal fort du gouvernement quant à son engagement en faveur de la stabilité, de la paix durable et du respect des droits humains. Il s’agit d’une étape cruciale dans le processus de réintégration des enfants et des jeunes manipulés par les groupes armés, souligne-t-il.
La CNDDR en tant que structure devrait, à un niveau ou autre, contribuer à un processus de paix durable dans le pays, particulièrement dans la région métropolitaine de Port-au-Prince. Or, en remontant à la première structure de la CNDDR jusqu’à cette toute dernière, il y a lieu de faire remarquer qu’elle n’a jamais contribué réellement à un processus de paix de manière significative en Haïti.
La première version de la CNDDR qui a été mise en place le 29 août 2006 à la suite d’un arrêté présidentiel sous l’administration de René Préval et du Premier ministre Jacques Édouard Alexis n’avait pas répondu aux attentes ni aux défis de l’époque. Combien de chefs de gangs, qui avaient choisi de déposer leurs armes ?
Sous l’administration de Jovenel Moïse, la CNDDR a été également d’actualité. Une autre version de cette structure a même vu le jour par décret présidentiel le 8 mars 2019. Et cette commission, par ailleurs, n’a pas pu donner les résultats escomptés.
Aujourd’hui, plusieurs quartiers de l’aire métropolitaine sont sous l’emprise des bandits armés. Et ces individus armés sont pour la plupart des enfants. « En Haïti, le recrutement et l’utilisation d’enfants par des groupes armés ont augmenté de 70% au deuxième trimestre 2024, par rapport à la même période en 2023, un enfant sur deux dans les groupes armés étant mineur », avait souligné l’UNICEF. À présent, est-ce qu’avec cette nouvelle commission, les résultats vont être différents ?
La Rédaction