Dossier Raboteau : quand BAI et RNDDH font la leçon à Me Sérard Gasius
4 min readLe Bureau des Avocats Internationaux (BAI) et le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) ont administré une leçon au commissaire du gouvernement près du tribunal de première instance des Gonaïves, Me Sérard Gasius. À travers une correspondance qu’elles ont acheminée au chef du Parquet de la cité de l’indépendance, le mercredi 16 juillet 20, ces organisations de droits humains ont fait savoir que celui-ci s’est grandement trompé en se dirigeant vers la Cour de Cassation avant de lui transmettre des documents relatifs au massacre de Raboteau. Ce, disent-elles pour pallier les paresses intellectuelles des magistrats et les tâtonnements en matière de procédure de contumace.
Ces derniers en aucun cas « ne pourraient exercer de recours contre ledit jugement eu égard à l’article 372 du Code d’Instruction Criminelle qui stipule ce qui suit « le recours en Cassation ne sera ouvert contre les jugements par contumace qu’au ministère Public et à la partie Civile, en ce qui la regarde. Par conséquent, Monsieur le commissaire du Gouvernement, vous avez fait fausse route en vous dirigeant vers la Cour de Cassation », estiment BAI et RNDDH après avoir appris à Me Sérard Gasius que les deux procès tenus dans le cadre du dossier de Raboteau avaient abouti à deux jugements distincts : celui du 10 novembre 2000 où les criminels présents au tribunal ont été condamnés et celui du 16 novembre 2000 où les accusés fugitifs ont condamnés par contumace, par le Tribunal Criminel des Gonaïves.
Ainsi, pour compenser ce tâtonnement en matière de procédure de contumace, la négligence ainsi que les paresses intellectuelles chez les magistrats qu’ils constatent dans le système, ces organismes ont soumis au Commissaire Gasius tout un ensemble de pièces relatives au jugement par contumace du 16 novembre 2000 tels que :
1- L’ordonnance de renvoi du juge instructeur, Mag Jean SENAT FLEURY, en date du 30 août 1999 ; 2- L’arrêt de la Cour d’Appel des Gonaïves en date du 15 février 2000 contre l’ordonnance de renvoi du juge instructeur en date du 30 août 1999 ; 3- L’arrêt de la Cour de Cassation en date du 15 mai 2000 contre l’arrêt de la Cour d’Appel des Gonaïves en date du 15 février 2000 ; 4- L’acte d’accusation de Me Louiselmé JOSEPH, Subtitut du Commissaire du Gouvernement Près le Tribunal de Première Instance des Gonaïves es en date du 04 septembre 2000 ; 5- L’arrêt de la Cour de Cassation en date du 3 mai 2005 contre le Jugement du Tribunal Criminel des Gonaïves en date du 10 novembre 2000 ; 6- Le jugement par contumace rendu par le Tribunal Criminel des Gonaïves en date du 16 novembre 2000 ; 7-Le Moniteur du 23 novembre 2000 publiant l’extrait du plumitif d’audience du jugement par contumace en date du 16 novembre 2000.
Ces militants ont par ailleurs indiqué « qu’il n’y a pas encore lieu de procéder dans la forme ordinaire, motifs pris de ce que le jugement par contumace et les procédures faites en la matière n’ayant pas été anéanties de plein droit conformément au 1er article alinéa 375 du Code d’Instruction Criminelle mis à jour par Jean Vandal » puisque depuis le jugement du 16 novembre 2000, Toto Constant est le seul condamné à être arrêté et emprisonné.
Les militants de droits humains en ont profité pour exiger l’arrestation des autres individus qui, en dépit de leur culpabilité dans ce massacre, vaquent librement à leurs activités en toute impunité. « Il s’avère urgent et nécessaire qu’en tant que commissaire du gouvernement, défenseur ne de la société, chef de poursuite, titulaire réel et unique du droit d’action publique, de passer des instructions formelles pour que les contumax dont les noms figurent dans le dispositif du jugement susmentionné soient arrêtés, puis déposés à la prison civile des Gonaïves pour être fait ce que de droit, conformément à la loi régissant la matière », lit-on dans cette correspondance.
Les Etats Unis, pour leur part, s’alignent sur la même position que les organisations de défense des droits humains. En effet, à travers un tweet qui a été repris par l’Ambassade américaine à Port-au-Prince, le secrétaire adjoint par intérim du Bureau des affaires de l’hémisphère occidental du Département d’État américain, Michael Kozak avait clairement exprimé la position du pays de Donald Trump en faveur de la condamnation et de la mise en détention d’Emmanuel Constant. “ Nous continuons de nous tourner vers les autorités haïtiennes pour que justice soit rendue aux victimes du massacre de Raboteau et pour tenir Emmanuel Constant responsable des crimes qu’il a commis en Haïti. L’établissement de l’État de droit commence par la fin de l’impunité”, a écrit le diplomate. Il est à signaler que ce n’est pas la première fois que Michael Kozak réclame justice pour les victimes de Raboteau. Il l’avait déjà fait au lendemain de la déportation en Haïti de l’ex-leader du Front pour l’Avancement et le Progrès d’Haïti (FRAPH).
Marc Andris Saint-Louis