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Cour de Cassation : Par un appel à candidatures, le MJSP veut combler les postes vacants

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La Cour de Cassation est en manque de personnel depuis 2021, le Ministère de la Justice et de la sécurité publique (MJSP), par le biais de son titulaire, Me Berto Dorcé, propose de combler ce vide en lançant un appel à candidatures.

Le personnel de la Cour de Cassation se réduit peu à peu. Dans une situation particulière et inconstitutionnelle, le feu Président de facto, Jovenel Moïse, avait envoyé trois juges à la retraite  Yvickel Dieujuste Dabrésil, Wendelle Coq Thélot et Joseph Mécène Jean-Louis, alors que  leur mandat de 10 ans n’était pas encore arrivé à terme. Le juge René Sylvestre de son côté est mort en fonction. En somme, ce sont autant de raisons et d’autres, au cours de l’année 2021,  conduisent la Cour vers une situation de dysfonctionnement complet.

La Cour de Cassation est la plus haute instance judiciaire du pays mais elle n’est pas un degré de juridiction. Comme le dispose la Constitution de 1987, 12 juges doivent être nommés par le Président de la République. Les juges de la Cour de Cassation sont inamovibles et ne sont justiciables que par devant la Haute Cour de Justice. La Cour est saisie par un pourvoi. Elle statue sur la forme et non le fond des décisions prises par les cours et tribunaux. L’importance de la Cour est primordiale dans les décisions de justice, mais surtout pour les justiciables. Donc, renouveler le personnel de la Cour est un impératif.

Situation extraordinaire, mesure extraordinaire ?

Comment doit se faire le processus de la nomination des juges à la Cour de Cassation ? L’article 175 de la Constitution de 1987 stipule clairement : « Les juges de la Cour de Cassation sont nommés par le Président de la République sur une liste de trois (3) personnes par siège soumise par le Sénat ». Le Sénat doit d’abord soumettre une liste de juges au Président de la République et ce dernier les nomme, tandis que  le CSPJ de  son côté soumet son avis.

Mais la situation dans laquelle se trouve le pays ne répond à aucune disposition de la Constitution en ce qui concerne la nomination des juges. Pour commencer, le Président d’Haïti est mort et il n’a jamais été remplacé depuis le 7 juillet 2021, le Sénat est pratiquement dysfonctionnel (Il y a seulement 10 Sénateurs en fonction). De ce fait, la nomination des juges à la Cour de Cassation et les recommandations de la Constitution ne peuvent pas être conciliées. Face à cette situation exceptionnelle, le Ministre de la Justice et de la Sécurité Publique, Me Berto Dorcé,  a mis en place un moyen pour contourner les lois  et y remédier: « un appel à candidatures ».

« Le  Ministère de la Justice  et de la Sécurité Publique invite les avocats des différents Barreaux de la République intéressés,  à soumettre également dans les plus brefs délais, leur dossier de candidature, au siège du ministère, en vue de combler les postes vacants à la Cour de Cassation », peut-on lire dans l’appel à candidatures en date du 22 février 2022.  L’appel à candidatures a aussi rappelé que « conformément à l’article 15, 2ealinéa du décret du 22 août 1995 relatif à l’organisation judiciaire, ils devront avoir exercé la profession d’avocat pendant dix (10) ans au moins ». Selon le ministère, les candidats ont jusqu’au lundi 28 février  2022 pour remettre leur dossier et « devront répondre aux conditions prescrites à l’Article 51 de la Loi du 27 Novembre 2007 portant sur la magistrature ».

Le CSPJ et le Sénat fixent leur position

Le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ), organe de contrôle et d’administration, s’oppose catégoriquement à la décision du Ministre Dorcé de remplacer de façon inconstitutionnelle des membres de la Cour de Cassation. Dans une lettre du secrétaire technique du CSPJ, Me Jean Robert Constant, il rappelle au Ministre de la Justice les dispositions de la Constitution haïtienne, mais aussi le rôle du CSPJ, qui n’est autre que de donner son avis sur une liste déjà constituée.

Le tiers du Sénat de la République a aussi fixé sa position par rapport à l’appel à candidater des juges à la Cour de Cassation et affirme que « les institutions ne peuvent pas transférer plus de pouvoir qu’elles n’en ont ».

Pour Joseph Lambert, Président du tiers du Sénat, « la nomination des juges est réglée par l’art 175 de la Constitution. C’est le Sénat  qui propose  la liste des juges au Président de la République qui les nomme pour voir le CSPJ les apprécier et les certifier ». D’après  M. Lambert, « le Sénat est incomplet et le Président de la République est décédé. Seul un consensus entre  le Sénat et le CSPJ et les forces vives organisées de la nation peut  permettre un mode opératoire en l’espèce ». Il aussi indiqué qu’ « aucun des trois pouvoirs, chacun dans son infirmité, ne peut s’arroger plus de prérogatives qu’il n’en a, et il y a lieu d’éviter les déconvenues qui déshonorent davantage ».

De son côté, le Bâtonnier Évens Fils, membre du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) tient à dénoncer la situation, nous invite à ne pas transgresser les lois, mais à reconnaître nos forfaits : « Le problème de la Cour de Cassation, dit-il, nous concerne tous aujourd’hui. Le principe de la continuité du fonctionnement des institutions de l’État doit être respecté même dans un régime d’exception. On doit inéluctablement trouver une solution dans le respect des principes du droit et des valeurs universelles. Ce n’est pas l’occasion de rouvrir les brèches, mais celle de reconnaître les conséquences de nos dérives. » 

Danie Charlestan

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