ven. Avr 19th, 2024

Le Quotidien News

L'actualité en continue

Dialogue de sourds!

4 min read

Depuis bientôt quatre ans, les acteurs ne parlent que de ça: l’obligation d’un dialogue national. Le tournant qu’a pris la crise politique y a prêté le flanc. Cependant, les protagonistes concernés n’ont pas su en profiter.

Le besoin de ces pourparlers est une nécessité de plus en plus pressante ces derniers temps. Au regard de la conjoncture, c’est la seule solution qui reste à la nation pour espérer un apaisement de la situation, revenir à la stabilité et à l’ordre démocratique. Pas mal d’initiatives sont prises en ce sens. Plusieurs accords sont conclus à cet effet. Certains acteurs se sont regroupés. Pourtant, la crise perdure. L’entente réelle tant espérée demeure utopique.

Ce blocage peut s’expliquer par l’égoïsme et la mesquinerie des acteurs. Le minimum de rapprochement tenté n’a pas réussi à faire bouger les lignes.  À trois reprises, le Premier Ministre Ariel Henry a boudé une invitation au dialogue lancé par le Sénat de la République.  La dernière en date du lundi 21 mars 2022. Ce qui est surprenant dans cette histoire, c’est que le Premier Ministre lui-même, dans un tweet daté du 18 mars, a lancé un appel au dialogue. Quel dialogue au juste? Qu’est-ce que cela signifie en fait ? Pendant tout ce temps, la population haïtienne ne cesse de croupir dans la misère, l’insécurité, l’anxiété, le désespoir.

La nation est en péril. Le chaos s’installe. Les familles s’appauvrissent. Tout est conditionné par la volonté de puissance des gangs. La protection des droits humains en Haïti est à son plus bas niveau. Le plus paradoxal dans cette situation, c’est l’arrogance des incompétents au pouvoir qui prétendent être des leaders et des dirigeants.

Face au laxisme des prétendues autorités et au jeu coquin des autres acteurs impliqués dans la recherche d’une solution à la crise, deux dictons de la culture haïtienne peuvent servir d’hypothèse pour essayer de comprendre cette réalité politique : « tout nèg gen mayi yo nan solèy y’ap veye lapli » et « chat konnen rat konnen, barik mayi a rete la ». La conclusion à tout ça, c’est que le pays s’autodétruit à petit feu.

Le gros du problème est le fait que ces pseudo-dirigeants considèrent le pays comme un bien privé. Depuis des lustres, le pouvoir est perçu par les hommes politiques non pas comme une responsabilité, mais comme une propriété, comme un privilège, un acquis, pour lequel ils n’ont aucun compte à rendre. Une fois arrivés au timon des affaires, les dirigeants n’écoutent qu’eux-mêmes. Ils considèrent qu’ils sont au-dessus des lois et gèrent les affaires du pays comme bon leur semble, au mépris du bien-être collectif.

Est-il nécessaire de rappeler que toutes les institutions démocratiques du pays sont démantelées depuis quelque temps? Les acteurs politiques, à l’origine de cette crise, ne sont-ils pas au courant de cette migration clandestine et à risque de la population vers des cieux plus cléments ? Ne savent-ils pas que le dollar a déjà dépassé la barre des cent gourdes, que le pays est divisé en plusieurs mini territoires occupés par des gangs ? Pourquoi, s’obstinent-ils à négocier des miettes ? Pourquoi trois Premiers Ministres ? Pourquoi deux Présidents ? Cette politique du « ôte-toi delà pour que je m’y mette » ne fait qu’enfoncer davantage le pays dans l’abîme.

S’enferrer dans cette logique, c’est comme compter chaque grain de sable au bord du rivage. L’important, c’est de nous accepter en tant qu’être humain et de nous asseoir pour discuter du redressement de la nation en nous fondant sur le bien commun. Le pays a besoin de leaders, et non pas d’opportunistes qui veulent s’enrichir ou se déguiser sous les oripeaux du pouvoir politique pour esquiver la justice. Le pouvoir politique ne doit plus être considéré comme une cachette pour des corrompus. La dilapidation du fonds Petro Caribe, l’assassinat de Jovenel Moïse, le financement des gangs armés, l’assassinat de Monferrier Dorval, les différents massacres de civils innocents, sont des crimes qui méritent d’être sanctionnés avec la plus grande rigueur. Arrêtez de marchander des postes politiques pour vous-mêmes et vos amis. Construisez sur l’essentiel en rétablissant la sérénité, la démocratie, la confiance, au lieu de mettre en œuvre pitoyablement des stratégies déloyales pour tirer votre épingle du jeu.

Daniel SÉVÈRE

danielsevere1984@gmail.com

Laisser un commentaire