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La manie du chef !

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On n’a jamais pris le temps d’examiner en profondeur la racine du mal qui ronge le pays. Souvent, nos analyses traitent les questions en restant à la surface. On omet un conflit majeur qui est chez nous à la base de cette aigre transformation de la vie en société.

Si l’on fait abstraction de tous les facteurs tape-à-l’œil, un élément est à considérer. Il s’agit de cette tendance silencieuse et grandissante qui est la manie du chef. La volonté de vouloir à ses pieds tous les humains. La tendance à se faire vénérer, le besoin pressant de tout dominer. Le souci d’être toujours placé en position de domination.

On a souvent dit que diriger, c’est prévoir. Donc, cela requiert un minimum de planification, de bon sens, mais aussi d’humanité. Au couronnement de tout ça, le leadership et  la connaissance.

Dommage, cette volonté qui émane d’un complexe, on dirait d’infériorité,s’immisce en nous sans que nous nous en rendions compte. La logique est tellement intériorisée, chacun se proclame chef dans son coin, ou s’imagine l’être. Finalement, ça déborde la famille dans son expression restreinte, pour s’étendre dans les quartiers, les institutions, le pouvoir politique, entre autres. Conséquence, la mesquinerie, la violence, l’incompétence dans les plus hautes sphères de décision de l’État et, boom, la catastrophe !

Cette logique nous donne les gangs qui se croient invulnérables, intrépides et inamovibles. Petit à petit, ils créent leur monde et se font appeler commandants, généraux, etc. Toutes leurs actions tournent autour de cette lubie. Ils veulent réduire à la passivité et soumettre tout le monde. Pourtant, ils ne sont que les serviteurs d’un autre maître qui peut à son tour être l’esclave d’un autre. La logique de chef leur fait prendre des voies sans retour possible. Ils volent, kidnappent, terrorisent la population juste pour pouvoir être sous les projecteurs. Sans se  poser la question de savoir de quoi sera fait leur avenir et celui de leurs descendants. À quoi vont servir ces fortunes volées, cette autorité éphémère.

Quant aux hommes politiques c’est cette tendance qui les hante à devenir si cyniques et sans scrupule.  » apre yo dwe toujou yo », c’est le seul combat des politiciens haïtiens. Ils entretiennent cette logique en formant des groupes de petits chefs. D’où l’image que nous renvoie la conjoncture actuelle. En Haïti, le pouvoir, c’est le pouvoir sans aucune responsabilité ni reddition de comptes. Le pouvoir, c’est celui de jouir de privilèges, de passer des ordres en obéissant à ses intérêts mesquins, se faire vénérer, etc. Au service de tout ça, le système éducatif en pleine décadence.

Comment expliquer cette flambée d’insécurité dans le pays ? Pourquoi conjuguer toutes les énergies pour la mise en place d’un processus électoral dans un contexte d’inquiétude maximale? Comment penser à réaliser des élections dans une conjoncture où l’État donne tous les signes d’être un corps inexistant ? Hormis la misère qui guette la population, cette logique de se faire des esclaves consciemment ou inconsciemment est la cause profonde de notre malheur. Tout un lexique a été créé pour la matérialisation du projet :  » Boss, patron, commandant, etc., telles sont les expressions les plus courantes de cette machine à manipulation.

Le choix d’organiser des élections dans la douleur et les gémissements de la population est l’expression parfaite des pitoyables tentatives des dirigeants politiques de se renouveler.

Daniel Sévère

danielsevere1984@gmail.com

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