La presqu’île du Sud en détresse après le passage du séisme du 14 août
5 min readLa date du 14 août 2021 restera comme un jour noir dans l’histoire d’Haïti, en raison de ce tremblement de terre qui a dévasté toute la presqu’île du sud d’Haïti. Le bilan, encore partiel, est insoutenable. Les sinistrés qui manquent de tout lancent des appels au secours. Cette catastrophe naturelle s’ajoute aux multiples calamités qui déjà avant constituaient le quotidien des habitants.
Comme s’il ne suffisait pas d’avoir la crise politique et des problèmes de toute nature sur le dos, les Haïtiens ont vu le ciel leur tomber sur la tête quand, à 8h30 du matin, le 14 août 2021, la terre a tremblé. 7.2 sur l’échelle de Richter. Les départements de la côte sud du pays, à savoir le Sud, les Nippes et la Grand’ Anse ont été très durement frappés. Aux dires des spécialistes qui interviennent sur la question, ce nouveau séisme de par son ampleur dépasse celui de 2010 qui a mis les habitants de la région métropolitaine de Port-au-Prince à genoux.
Aujourd’hui, on entend des pleurs un peu partout dans le grand Sud où il y a des appels incessants au secours après ce séisme dévastateur. La détresse est si profonde, que certains parlent d’une fatalité qui serait propre à Haïti à travers ces catastrophes en tous genres qui s’abattent sur le pays. Pourtant, ce qui nous arrive n’a rien à voir avec une malédiction.
Un bilan provisoire insoutenable
En effet, les dégâts provoqués par ce séisme meurtrier sont considérables : femmes enceintes, enfants, jeunes, adultes et vieillards ont payé un lourd tribut à travers ce cataclysme qui a tout ravagé sur son passage. Le bilan provisoire établi par la protection civile jusqu’au 18 août 2021 fait état de 1941 décès, 4 jours après le séisme du 14 août. 1597 morts ont été dénombrés dans le Sud, 205 dans la Grand’Anse, 137 dans les Nippes et 2 dans le Nord-ouest, selon le dernier bilan de la Protection civile dans son communiqué dans la soirée du 17 août. Un total de 9900 blessés a été aussi comptabilisé, selon les autorités. Plus de 75 mille maisons détruites ou endommagées.
Des efforts ont été déployés pour retrouver des survivants. La garde côtière américaine a commencé à transporter des membres de l’équipe vers les zones touchées pour initier les opérations de recherche et de sauvetage. D’autres victimes, peut-être, moins chanceuses, coincées sous les décombres ont dû appeler au secours pendant plusieurs jours après la catastrophe, avant d’être saisies par l’aiguillon de la mort. Trois journées de deuil national ont été décrétées pour honorer la mémoire des victimes de ce tremblement de terre meurtrier, soit du 17 au 19 août 2021.
La férocité de la catastrophe
L’hypocentre étant de 10 kilomètres, le tremblement de terre du 14 août a provoqué d’importants glissements de terrain dans certains endroits, comme c’est le cas à Camp-Perrin, ou au Saut Mathurine qui, avant la catastrophe émerveillait ses visiteurs de par sa beauté. Aujourd’hui, les images tournantes sur les réseaux sociaux dépeignent une toute autre réalité après la catastrophe. Dans plusieurs autres régions, des routes ont subi de graves fissures, jusqu’à paralyser même la circulation. La férocité de ce cataclysme s’est en outre, manifestés quand des paysans qui se trouvaient sur une montagne y ont été engloutis vivants.
L’accès aux soins d’urgence et l’élan de solidarité
Ceux qui ont été sauvés de justesse manquent de tout. La situation des sinistrés dans la presqu’île du sud est critique. Jusqu’à date, la présence des Autorités s’est fait peu sentir. Dans l’intervalle, l’aide internationale commence à être mobilisée. Le commandement Sud des États-Unis du Département de la Défense a envoyé 8 hélicoptères en Haïti en vue d’assurer le transport du personnel et des matériels dans le cadre de l’assistance américaine aux sinistrés de la catastrophe du 14 août.
Dans le même registre, l’Union européenne a mobilisé 3 millions d’euros. Le décaissement de ces fonds a été consenti dans le cadre d’une assistance humanitaire aux sinistrés confrontés notamment à des besoins urgents en matière de logement et de médicaments.
C’est dans ce contexte que le Chef du gouvernement a essayé de rassurer les sceptiques. « Il y aura une très bonne gestion de l’aide locale et internationale post-séisme au pays », a promis Ariel Henry au cours d’un conseil spécial dans les locaux de la Protection civile, rappelant que toute l’aide, d’où qu’elle vienne, doit passer par la Direction Générale de la Protection civile.
Les malheurs s’additionnent
28 détenus se sont évadés le 14 août de la prison civile des Cayes, à la faveur du séisme, a indiqué le Commissaire du gouvernement, Ronald Richmond. Ils avaient incendié un total de 7 cellules avant de creuser un trou à l’arrière du bâtiment en vue de pouvoir s’échapper, a précisé Maître Richemond. Ces évadés vont contribuer à alimenter l’insécurité dans la presqu’île du Sud.
Alors qu’on n’avait pas fini de compter les cadavres dans le grand Sud, la tempête tropicale Grace avait déjà touché les côtes d’Haïti: pas moins de 4 morts ont été recensés par les responsables de la Protection civile à Cayes-Jacmel et à Marigot où les averses ont provoqué de grosses inondations.
Cessez-le-feu momentané des gangs à Martissant ?
Sur les réseaux sociaux, le caïd de Village de dieu, Izo 5 secondes, a annoncé une trêve au niveau de la guerre pour faciliter, dit-il, l’acheminement de l’aide dans le grand Sud. Cette annonce a été précédée de pourparlers initiés par l’ancien maire de la commune de Carrefour Yvon Gérôme et d’autres notables de la zone avec les groupes armés pour un apaisement de la situation.
Si les armes ne retentissent pas pendant quelques jours dans la troisième circonscription, on ignore cependant pour combien de temps ça va durer. Et cela ne suffit pas non plus à garantir qui pilote les convois d’aide humanitaire dans le grand Sud ni quelles sont les autres personnes qui empruntent la route nationale numéro 2, quand on connaît le niveau de dégradation du climat sécuritaire à l’entrée Sud de la capitale haïtienne depuis quelques temps.
Des observateurs qui analysent de près la situation expriment leurs préoccupations sur la manière dont les Autorités de l’État central entendent organiser l’aide afin de permettre aux sinistrés même dans les endroits les plus reculés d’en bénéficier.
Des préoccupations qui sont pour le moins légitimes, si l’on considère la malencontreuse expérience faite après la catastrophe de 2010 où plus de 11 milliards de dollars américains avaient été mobilisés au nom du peuple haïtien pour reconstruire le pays. Alors que cette somme faramineuse n’a jamais été acheminée à la population sinistrée.
Mario Sylvain