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Laloi, entre les vers de ses slams

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L’expression brute, le verbe exact et l’art déclamatoire approprié, c’est ainsi que les supporteurs décrivent la posture de Laloi. Il décrit l’amour, revendique sa patrie et la liberté de ses fils. Chacun de ses vers retrace une histoire d’où part une émotion sensible. Un mot, une phrase et tout devient poésie. À travers les lignes de l’oralité, Laloi s’expose et se laisse aller.

Theodore Laloi, plus connu sous le nom de Theod’art est né un 30 juillet 1994 à Jacmel, la ville aux milles couleurs. Il perd son père en 2018 et grandit sous la garde de sa mère. Il fréquente le Lycée Pinchinat de Jacmel et le collège Milo Gousse où il passe son baccalauréat avant de venir s’installer à Port-au-Prince en 2016 pour ses études universitaires. Il entame alors  des études en histoire à l’Université d’État d’Haïti (UEH). Après trois années d’études, il abandonne la tâche qui s’avère compliquée peu à peu à cause de la situation chaotique du pays. Il part s’installer alors définitivement en République Dominicaine où il expérimente ses talents de slameur et de graphiste.

La première fois que Laloi rencontra le slam en 2012, il était invité par un ami pour partager un film et parler de trucs de gamins. En fouinant un peu dans l’ordinateur que son ami  lui avait prêté, il tombe sur une œuvre magistrale de l’artiste (Slameur), Grand Corps Malade. «  Le son me coupe le souffle. J’étais stupéfait devant cet exploit. L’école de la vie, le titre qui me transperce l’âme et me laisse ébahi a hanté mon existence pendant un certain temps »,  raconte Laloi.

Son ami lui donne alors quelques applications et il décide de faire d’autres recherches pour mieux approfondir sa découverte. Puis en 2013, l’occasion lui fut donnée d’assister à un spectacle de slam à l’Alliance Française de Jacmel où se produisait le Collectif Feu-vert. Du jamais vu qui le cloua au sol. Il décide alors d’en faire autant. «  En 2015, j’ai été champion d’un grand concours de poésie à Jacmel réalisé par une organisation féministe et qui traitait des thématiques sur la violence faite aux femmes, ce fut du tonnerre. C’est ainsi que je me suis mis à suivre les traces de Grand Corps Malade en intégrant le monde du slam », confie l’originaire du Sud-Est au journal.

Des amis rencontrés à Port-au-Prince l’ont convaincu de suivre des formations pour mieux structurer sa poésie afin qu’elle puisse faire partie intégrante de la nouvelle société en traitant de sujets sensibles. C’est alors qu’il passe de la poésie au slam. Des vers langoureux aux longues phrases militantes. Son premier slam voit alors le jour en 2017. Bénéficiant du projet évangélique « Merci Jesus », Laloi joint sa voix à celle de Sisie pour slamer du fond de la terre aux étoiles du ciel.

Il partage ses apparitions sur scène entre Jacmel et Port-au-Prince. Il se produit dans des bars en bord de mer. Il est peu connu, dit-il, mais il laisse sa trace. « J’ai intégré assez rapidement le slam et je me suis entouré d’amis qui partagent ma passion, avec qui je m’améliore. Il m’invite à des soirées et me passent le micro. Ils apprennent de moi et j’apprends de leur expérience », explique celui  qui est plus connu sous le sobriquet Theod’Art.

Laloi a toujours fait face à des situations qui l’ont incité à travailler davantage. Il n’a jamais douté de sa capacité à produire des textes qui relatent l’essentiel de ce qu’il veut faire passer. S’efforçant de faire de son mieux au jour le jour, il essaie de dominer la pression en misant sur son talent de graphiste. « Avoir une profession, dit-il,  est une technique qui m’a sauvé. Faire du graphique design m’a fait rencontrer des producteurs qui m’ont boosté et des fois, je ne paie pas mes enregistrements comme un artiste quelconque. On voit le graphiste et ensuite on voit le slameur. Ça aide de toucher à tout quand on est artiste ».

Laloi vénère la beauté haïtienne à travers ses textes dont « Tankou chokola »  mettant en vedette Tchele Beng et Ocean Sucré en collaboration avec J-Panesty. Profitant de sa voix et de son titre de slameur, il produit des textes sur les situations dépravantes et chaotiques qui plongent le pays dans le désespoir. Ce désespoir qui l’a poussé à fuir son pays vers un destin méconnu.

 « Bout anba a » mettant en vedette Demannyè, « Leta pa bezwen n »  mettant  en vedette Diddy skyman, « Leta pa bezwenn 2 »  mettant en vedette Sympa avec lesquels il avait lancé un challenge. Après une courte pause, il revient avec un tube entraînant qui attisa le feu entre les slameurs qui somnolaient. Dralp (De retour après la pause) avait été apprécié à sa juste valeur et les supporteurs en redemandaient. Il termine avec « Bilan Ninja yo »  mettant en vedette Lekritizè pour terminer le challenge qui avait agité un peu la toile.

« Yo pouse n ale »,  est son dernier cri face à la crise migratoire qui cause une fuite des cerveaux dans un pays en proie à la destruction. Il ne saurait passer sous silence ce fléau qui ravage la première République noire au monde, la terre de la liberté.

« À tous les jeunes, ne jamais cessez de rêver », conseille Laloi. « C’est cela qui donne un sens à la vie, qui stimule votre créativité. Ne vous contentez pas seulement d’essayer, mais surtout d’acquérir le sens de la poésie avant de vous engager dans le slam. Apprenez du slam et apprenez pour le slam. Méritez votre talent ».

Genevieve Fleury                               

genevievef359@gmail.com

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