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L’avenir des jeunes écoliers hypothéqué par la menace armée en plaine du Cul-de-Sac

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Depuis le matin du dimanche 24 avril, toutes les activités sont à l’arrêt dans une grande partie de la plaine du Cul-de-Sac qui se trouve à quelques kilomètres seulement au nord de Port-au-Prince. Deux semaines plus tard, les portes des établissements restent fermées, et des familles continuent à fuir les zones de conflits, emmenant les enfants loin des tirs incessants.

Personne ne semblait s’y attendre. Ce sont les résonnements des tirs aux armes semi-automatiques qui ont réveillé les cruciens ce dimanche 24 avril 2022. Cet état de fait a plongé le secteur éducatif haïtien une fois de plus dans l’incertitude. « Toutes les écoles ont tacitement fermé leurs portes. Le phénomène nous a tous pris de court. Il n’y a pas que le secteur éducatif qui en soit victime, mais le petit commerce, le transport, tout le monde indistinctement », raconte Fedner, responsable d’une école à Santo, à la Croix-des-Bouquets. « Vers la fin de cette deuxième semaine d’affrontement, des activités tendent à se reprendre timidement. Quelques marchands ambulants osent affronter les rues, n’ayant pas d’autres choix pour survivre. Mais les écoles demeurent toutes fermées, même dans les zones les moins affectées », dit-il. 

Pour lui, il sera difficile pour les élèves de la région d’avoir le moral de continuer l’année scolaire avec intérêt. Personne ne le pourrait, encore moins les plus jeunes. « Les enfants, en particulier les plus jeunes, sont très traumatisés. Pour la plupart, ce genre d’évènement est nouveau, surtout dans la région de la Plaine. L’éducation des enfants est hypothéquée, leur santé morale est au plus bas. J’ai moi-même des enfants en bas-âge, et je peux directement constater la situation », confie le directeur Fedner au journal.

L’avenir s’assombrit peu à peu

Les professeurs, eux non plus, ne semblent pas avoir la force nécessaire pour entrevoir un dénouement positif à cette situation. Pour le professeur Bufon qui enseigne dans des écoles de la sous-région, la menace des gangs a de sérieux impacts sur le corps professoral. « Les impacts de cette situation sont nombreux. Nous avons la peur au ventre, économiquement nous sommes sévèrement touchés, l’inflation était déjà là mais la situation a tout paralysé, nous pensons déjà au fait que le programme ne sera pas correctement bouclé étant donné que le nombre de jours de classe était déjà insuffisant. Il n’y a pas de vie dans la communauté, en somme c’est toute notre personne qui est impactée par cette crise », dit-il avec regret. Pour le professeur, les traumatismes devraient être pris en charge par des professionnels de la santé mentale, mais qu’en sera-t-il vraiment ?

Depuis plusieurs années, nombreuses sont les situations qui ont conduit à l’arrêt des activités scolaires, et à chaque fois les avis tendent à espérer que l’année scolaire puisse être bouclée. Pour le professeur, l’important n’est pas d’atteindre la date de la fermeture pour boucler l’année scolaire, mais de respecter le nombre de journées de travail avec les élèves. « Il ne doit aucunement être aujourd’hui question de boucler l’année. Boucler l’année, ce n’est pas fermer les portes de l’école au mois de juin mais c’est plutôt avoir un nombre de jours de classe raisonnable et dans un contexte qui permette un apprentissage. À mon avis, c’est une année ratée, quoi que l’on puisse faire », soutient-il. 

Ces arrêts répétitifs auront des conséquences, selon lui. « Nos diplômés auront des lacunes énormes. Nous serons très peu compétitifs, nous aurons des citoyens limités intellectuellement. Le pire, c’est que notre système ne sera pas homologué par les autres. Tant vaut l’école, tant vaut la société, donc nous aurons demain une société à l’aune de notre éducation », argue celui qui croit que la situation n’est pas prête de s’améliorer. « Ce n’est pas que je sois pessimiste, mais tout laisse croire que la situation va durer. Il n’y a rien de sérieux qui est fait pour freiner les actes. La crise nourrit la crise. Qu’est ce qui est fait pour que cela s’arrête ? À mon sens rien ». « Toutefois, faisons appel à une prise de conscience collective et agissons, dit-il. Sinon, après ce sera encore pire ».

Clovesky André-Gerald Pierre

cloveskypierre1@gmail.com

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