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Le Gouvernement prend un décret sanctionnant les crimes financiers

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À côté des différentes mesures des autorités financières, les efforts de l’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC), de l’Unité Centrale de Renseignements Financiers l’UCREF et de la justice haïtienne, c’est à présent le Gouvernement qui légifère sur les crimes financiers dans une situation de vacance parlementaire.

« Décret sanctionnant le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et le financement de la prolifération des armes de destruction massive en Haïti », pouvait-on lire  dans le Moniteur Spécial No 12, paru le 4 mai 2023, abrogeant expressément et totalement la « Loi du 21 février 2001 sur le blanchiment des avoirs provenant du trafic illicite de la drogue et d’autres infractions graves », la « Loi du 11 novembre 2013 sanctionnant « le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme » ainsi que ses modifications de 2016.

Considérant, entre autres, que « l’introduction de fonds provenant d’activités illicites dans l’économie nationale et dans le système financier, peut nuire à la stabilité et à la réputation du secteur financier national et international » et le fait que « le Pouvoir Législatif est inopérant et qu’il y a alors lieu de légiférer par Décret sur les objets d’intérêt public », le Gouvernement a décidé de soutenir « la prévention et la répression du blanchiment de capitaux, du financement du terrorisme et du financement de la prolifération des armes de destruction massive en Haïti », et d’imposer des mesures visant à les détecter et à les décourager.

Selon ce Décret, l’origine de capitaux ou de biens est illicite lorsque ceux-ci proviennent de la réalisation d’une infraction liée entre autres au terrorisme ou au financement du terrorisme, à la criminalité organisée, à différents trafics illicites, à l’enlèvement, la séquestration et la prise d’otages, à la contrefaçon de biens ou de titres de propriété, aux infractions fiscales, etc. Une disposition plus qu’importante dans une conjoncture caractérisée par une insécurité galopante et d’énormes scandales de corruption.

Le Comité National de Lutte contre le Blanchiment des Avoirs (CNLBA)

Pour « identifier, évaluer, comprendre et atténuer les risques de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme et du financement de la prolifération des armes de destruction massive auxquels Haïti est exposé », le « Comité National de Lutte contre le Blanchiment des Avoirs (CNLBA) est mis en place, et est composé de nombreuses autorités étatiques, de représentants d’institutions financières et de certains corps de métier, et est présidé par le Directeur Général du Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique.

« Aucune considération de nature politique, philosophique, idéologique, raciale, ethnique, religieuse ni aucun autre motif ne peut être pris en compte pour justifier la commission de l’une des infractions susvisées » (Art. 10)

L’UCREF au cœur de ce Décret

L’Unité Centrale de Renseignements Financiers (UCREF), créé par la Loi du 21 février 2001, est chargé de recevoir le signalement des institutions financières, des entreprises et professions non financières désignées dans le présent Décret. « Les institutions financières et les EPNFD doivent signaler à l’UCREF, par voie de communication électronique, par télécopie ou, à défaut, par tout moyen écrit, une opération suspecte en cours d’exécution. L’UCREF peut demander la suspension de cette opération lorsqu’elle estime que celle-ci présente des indices sérieux de blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme », peut-on lire dans son article 24.

Dès qu’apparaissent des « indices de nature à constituer l’infraction de blanchiment de capitaux ou d’une infraction sous-jacente ou l’infraction de financement du terrorisme, l’UCREF doit enquêter et faire son rapport au Commissaire du Gouvernement. « […] L’UCREF transmet un rapport sur les faits, incluant les résultats de son analyse, au Commissaire du Gouvernement pour les suites nécessaires. Ce rapport est accompagné de toutes les pièces utiles, à l’exception des déclarations de soupçon elles-mêmes », lit-on dans l’article 77.

Avec les activités criminelles qui ne cessent de s’étendre dans le pays, les autorités ont beaucoup de mal à reprendre le dessus. Malgré les différentes sanctions internationales à l’encontre de bon nombre d’acteurs haïtiens soupçonnés de participer à des activités maffieuses, l’insécurité ainsi que les cas de corruption n’en finissent pas. Plus d’un mois après l’entrée en vigueur de ce présent Décret, les signes d’un aller mieux ne pointent toujours pas à l’horizon.

Le présent Décret commence à susciter des controverses

D’après l’ancien Sénateur Steven Benoit qui ne voit pas d’un bon œil ce Décret du point de vue légal, ce dernier« abroge totalement 3 lois votées au Parlement presque à l’unanimité ». ( 21 Fév 2001, 11 Nov 2013 et 28 Sept 2016 ) . « Que dit la cour de cassation ? Que dit la Fédération des Barreaux d’Haïti ? Que dit la société? Moi, je proteste ! », a-t-il fait savoir dans un Tweet daté du 10 juin 2023.

Clovesky André-Gérald PIERRE,

cloveskypierre1@gmail.com

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