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Le référendum annoncé sur la constitution vu par des professionnels du droit !  

« Vers la fin avril, mi-mai, on espère avoir un référendum sur la constitution », avait déclaré le conseiller-président, Leslie Voltaire, lors d’une interview accordée à France 24 et à Radio France Internationale (RFI) le 29 janvier dernier. Cependant, pour Me Bolivard Delcarme et Me Darbenzsky Michaelange Gilbert, cette question de référendum est un pas de plus dans la violation de la constitution du 29 mars 1987.

Depuis 2021, les dirigeants qui ont succédé à la tête du pays ont toujours exprimé leur velléité de retirer Haïti sous l’égide de la constitution du 29 mars 1987. Et aujourd’hui encore, avec le Conseil Présidentiel de Transition (CPT), cette question refait surface. Le conseiller-président Leslie Voltaire l’avait affirmé haut et fort.  Cependant, pour le Directeur Exécutif de l’Ordre des Défenseurs des Droits Humains (ORDEDH) cette question de référendum est contraire aux prescrits de la Constitution du 29 mars 1987. « L’article 284-3 de la Constitution stipule que toute consultation Populaire tendant à modifier la Constitution par voie de Référendum est formellement interdite », a soutenu Me Darbenzsky lors d’une interview accordée à Le Quotidien News le 4 mars 2025 en précisant que cette disposition a été conçue pour prévenir toute tentative de manipulation unilatérale du texte constitutionnel en question par le pouvoir en place. De plus, dit l’homme de loi, « le CPT n’a aucune légitimité en termes de référence légale pour entreprendre un changement pareil ».

À travers l’article 282 de la Constitution du 29 mars 1987, il est clairement dit que toute réforme doit être initiée par l’Assemblée Nationale ou suivre une procédure rigoureuse, or nous sommes actuellement dans une situation hors norme, car les institutions républicaines comme le Parlement et l’Exécutif sont paralysées, explique Me Darbenzsky. « Donc, le prétendu référendum n’est qu’une tentative de passage en force qui risque d’aggraver la crise institutionnelle en Haïti », a affirmé le défenseur des droits humains.

Si les membres du CPT ont juré de respecter la Constitution, alors ils ne peuvent en aucune manière poser une action contraire aux prescrits de cette même constitution, a fait remarquer Me Darbenzsky. « La question de référendum est un projet de la communauté internationale. La majorité de nos dirigeants qui arrivent au pouvoir durant ces deux dernières années ont toujours eu l’appui de la communauté internationale. Et pour pouvoir mettre en œuvre son agenda, la communauté internationale a toujours besoin du support des gens qui sont au plus haut niveau de l’État», a-t-il martelé.

La souveraineté nationale

En se référant à l’article 59 de la loi mère du pays, Me Darbenzsky Michaelange Gilbert a fait savoir que la souveraineté nationale réside dans l’universalité des citoyens. « Les citoyens exercent directement les prérogatives de la souveraineté populaire par : a) Le Pouvoir Législatif; b) Le Pouvoir Exécutif; c) Le Pouvoir Judiciaire», explique-t-il en précisant que « le principe de séparation des trois (3) pouvoirs est consacré par la Constitution».

Vu que le Pouvoir Exécutif n’a pas de légitimité, vu que le Pouvoir Législatif est dysfonctionnel et parallèlement le seul Pouvoir sur lequel le pays peut encore compter, c’est le Pouvoir Judiciaire, alors il revient au Pouvoir Judiciaire de prendre le contrôle du pays pour préserver les acquis démocratiques, soutient le professionnel en se basant sur l’article 59 de la Constitution.

Me Darbenzsky n’est pas le seul homme de loi qui pense que cette question de référendum serait une violation de la Constitution du 29 mars 1987. Pour Me Bolivard Delcarme, c’est le même son de cloche.

Par ailleurs, selon Ulysse Jean Chenet, le coordonnateur du Mouvement Point Final, le moment n’est pas approprié pour parler de référendum. « Avant de parler de référendum, il faut résoudre le problème de l’insécurité cruelle que nous avons dans le pays », martèle-t-il lors d’une interview accordée à Le Quotidien News le 5 mars 2025.

Le référendum annoncé sur la constitution par Leslie Voltaire est une fausse manœuvre, soutient M. Chenet. « C’est juste pour faire comprendre que le problème du sous-développement et de l’instabilité revient à la Constitution du 29 mars 1987», avance-t-il.

Haïti est asphyxié par une crise multidimensionnelle aiguë. Du point de vue socio-économique, tous les indicateurs sont en rouge. La région métropolitaine de Port-au-Prince est prise en otage par les bandes armées. Le CPT peine à freiner leur offensive. Et ces mêmes autorités, « décaissent près de 500 millions de gourdes pour le carnaval », constate M. Chenet. Selon lui, si le pays va mal, ce n’est pas la Constitution du 29 mars 1987 qu’il faut pointer du doigt.

Le coordinateur du Mouvement Point Final estime que les autorités haïtiennes veulent utiliser la constitution du 29 mars 1987 pour cacher leurs responsabilités dans la destruction des institutions républicaines et la déstabilisation du pays.Ce qu’il faut aujourd’hui, dit-il, c’est l’organisation de la conférence nationale ou les États généraux de la nation et enfin, élaborer un projet de société avec un pacte de gouvernabilité pour une durée de 50 ans. « Et, à partir de ce moment, on pourra parler de référendum », a-t-il conclu.

Jackson Junior RINVIL

rjacksonjunior@yahoo.fr

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