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Les dernières missions des Nations Unies en Haïti ont échoué, selon l’économiste Camille Chalmers

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Haïti, terre de liberté ayant conquis son indépendance par la force des armes en 1804, s’apprête à subir, une fois de plus, selon certains, un affront révoltant : L’éventuel « déploiement immédiat d’une force étrangère spécialisée armée sur le territoire national ». « Nous avons vécu récemment 10 missions successives des Nations Unies et toutes ces missions […] ont échoué. Elles ont aggravé la nature de la crise sociétale en Haïti, ont contribué à affaiblir les institutions étatiques et ont renforcé la dépendance du pays par rapport à l’extérieur », déclare l’économiste Camille Chalmers.

Le Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres, est favorable à l’idée de la présence d’une « force armée internationale » en Haïti.  Face à cela, le professeur Camille Chalmers exprime son indignation en soulignant qu’il y a  une incompréhension totale et une instrumentalisation de la crise haïtienne. Économiste et représentant de la Plateforme Haïtienne de Plaidoyer pour un développement Alternatif (PAPDA), Camille Chalmers a déclaré lors d’une interview accordée à France 24, que le pays a vécu, depuis 1993, et de manière successive, 10 missions des Nations Unies.

« Toutes ces missions, en dépit des moyens importants qui ont été mis à leur disposition ont échoué. Elles ont aggravé la nature de la crise sociale en Haïti. Elles ont contribué à affaiblir les institutions étatiques. Elles ont renforcé la dépendance du pays par rapport à l’extérieur et aujourd’hui le pays est plongé dans une situation catastrophique », explique-t-il en précisant que les missions internationales en Haïti n’apportent aucune solution. « S’il est évident que ce n’est pas la solution. La solution ne peut pas passer par la répétition des mêmes erreurs. Les échecs répétés des missions internationales devraient servir de leçon », a-t-il poursuivi.

Indigné, l’économiste est revenu sur les propos d’Antonio Guterres qui assimilait les manifestations populaires de ces dernières semaines à des actions de banditisme. « En Haïti, nous vivons depuis 2016 un cycle important de mobilisation populaire qui dénonce les politiques gouvernementales et qui dénonce les politiques néolibérales et qui dénonce les tentatives d’effacer les gains démocratiques qui ont été arrachés par les luttes du peuple haïtien depuis la chute de la dictature », indique Camille Chalmers. Selon lui, il s’agit de préférence d’un mouvement de citoyens qui réclame justice, démocratie et qui proteste contre les politiques anti-nationales et anti-populaires qui aggravent la crise structurelle de la société haïtienne.

À en croire M. Chalmers, le Premier Ministre de fait Ariel Henry n’a aucune source légale et de légitimité. « Ariel Henry n’a présenté jusqu’à présent aucun calendrier électoral, aucun processus de sortie de cette situation transitoire. Nous sommes en présence d’une situation tout à fait hors Constitution et inacceptable », dénonce-t-il. « Nous ne voulons pas être dirigés par un système autocratique où toutes les décisions sont prises par une personnalité qui est aujourd’hui Premier Ministre et Président de la République et qui ne répond à aucune question parce qu’aujourd’hui il n’y pas de Parlement et aucune institution judiciaire non plus qui pourrait questionner ses actes politiques», a-t-il signalé.

« On nous a imposé pendant les 15 derniers mois un système politique qui est un retour à l’autocratie, un retour vers tout ce que le pays a rejeté et qui constitue une atteinte à la Constitution, un frein à la construction démocratique en Haïti et à l’émergence d’un plan  de sortie de crise, qui permettrait de résoudre les problèmes de fond de la société haïtienne »,  a fait savoir le professeur  Chalmers.

L’économiste par ailleurs souligne que les gangs criminels font partie d’un mécanisme de domination récurrent en Haïti pour faire face à la montée d’un mouvement populaire. « À la demande de participation politique des secteurs populaires, l’impérialisme et l’oligarchie locale utilisent deux formes de violence : la violence à travers les forces publiques institutionnalisées et la violence informelle à travers des bandes armées […], dit-il.

« Dans le cas de la conjoncture actuelle, il est clair qu’il y a eu une articulation politique et presque organique entre le pouvoir central et ces bandes armées […]. La conjoncture actuelle semble montrer qu’il y a eu une instrumentalisation de cette violence criminelle à des fins politiques pour conforter le pouvoir du PHTK et justifier aussi une intervention militaire qui,  au cours de ces dernières années, a toujours fait alliance avec les forces les plus rétrogrades et les plus anti démocratiques de la nation », a précisé  M. Chalmers.

Selon le représentant de la PAPDA, ce qui constitue l’indignation collective du peuple haïtien, c’est qu’il y a une alliance entre « ces forces rétrogrades et ce qu’on appelle la communauté internationale qui a une lecture totalement erronée de la crise haïtienne et de ce qu’il faut faire pour aider le peuple haïtien à résoudre cette crise ».

Camille Chalmers estime qu’aujourd’hui, les Haïtiens sont en présence d’un Gouvernement qui n’a plus le contrôle du territoire, d’un Gouvernement qui s’est allié aux forces mafieuses contre la population. « Aujourd’hui, on réclame la démission de ce Premier Ministre et la mise en place d’un régime de transition de rupture qui permettrait justement de revitaliser les appareils de l’État et de donner un autre sens à l’action publique », a-t-il conclu.

Jackson Junior RINVIL

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