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L’histoire émouvante de Katiana Milfort

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Comédienne, actrice et réalisatrice, Katiana Milfort est à même d’incarner avec dextérité tout personnage sur scène. Mordue de théâtre depuis son plus jeune âge, la réalisatrice de « Zaho , un film hommage à Vladjimir Legagneur  » consacre sa vie aux aventures scéniques.

Au spectacle, elle extirpe de son for intérieur tous ses ressentis, toutes ses vives émotions, pour en faire une source intarissable d’amour et de bonheur. « On ne peut être sur scène sans rien donner. Le comédien doit toujours partager quelque chose. Et moi, je partage de l’amour. C’est ce que je donne aux spectateurs », affirme Katiana Milfort, comédienne de grand calibre. Vu la facilité avec laquelle elle s’exécute, elle raconte sur scène ce   qu’elle a vécu ou pas, et chante parfois du même coup son histoire aux plus enthousiastes.  Elle fait tous les genres théâtraux, elle ne se voit pas dans Un genre, par exemple la comédie parce que « tout ne se dit pas ou ne s’explique pas en riant’’.

Sa rencontre avec le théâtre est aussi extraordinaire que sa personne. « En fait, j’avais un grand besoin de m’exprimer et de guider les autres hommes ou femmes, j’avais cette ardente envie de communiquer ce que je sentais au plus profond de moi », déclare la comédienne qui, après le décès de sa mère, a connu les difficultés de la vie.

L’histoire mouvementée d’une adolescente

Katiana Milfort vient au monde un 26 novembre, dans une famille agitée par les infidélités d’un père qui a  trompé pendant de longues années sa mère aimante, qui bravait tout pour le bonheur de ses deux filles. Katiana n’a que six ans quand son père quitte la maison pour ne plus revenir, suite à un chantage perpétré par l’une de ses concubines à l’égard de son épouse. « Ma sœur et moi, nous sommes nées de cette union, alors que mon père a   par-ci et par-là cinq enfants et, à l’insu de ma mère, cinq enfants qui portaient son nom», dit Katiana Milfort qui, contrairement à sa mère, connaissait l’existence de ses demi-frères et demi-sœurs. « Mon père m’emmenait assez souvent chez ses conquêtes. Et parmi elles, il y en avait une qui était plutôt spéciale, à qui il accordait plus d’attention », déclare la comédienne qui a su bien garder les vils secrets de son père. En dépit des liens forts qui semblaient les unir, au départ de son père, Katiana n’a point souffert. « A vrai dire, je ne sentais pas vraiment le manque de sa présence, car , ma mère a su bien entourer  ma vie et celle de ma sœur. Je n’ai pas vraiment souffert de son départ », confie  la directrice de EnJeu Production. Son père disparaît sans donner de ses nouvelles par peur de s’expliquer à sa mère.

Ce n’est que tardivement, alors qu’elle poursuit ses études secondaires chez les Sœurs de Saint-Louis de Bourdon, que Katiana revoit son père. « Les cours avaient terminé. J’attendais comme d’habitude le chauffeur qui devait me récupérer devant l’école, se rappelle la comédienne. Et je  vis soudain une voiture s’approcher de moi.  Je me suis reculée parce que je ne parle  pas aux inconnus. Quand le chauffeur est descendu du véhicule, je me suis rendu compte que c’était mon père », continue Katiana qui se rappelle s’être précipitée sur lui tant elle était heureuse de le voir après toutes ces années.

« C’est ce jour-là que je me suis rendu compte qu’il me manquait terriblement. Il m’a raccompagnée chez moi. Ma sœurette put reconnaître son père », déclare Katiana qui, malheureusement, allait écoper de la plus grosse raclée de sa vie. Sa mère, furieuse, avait pété un câble parce qu’elle ne voulait plus ses enfants aient  aucun contact avec cet homme qui lui avait fait tant de mal. En conséquence, Katiana Milfort a fugué le lendemain car elle ne pouvait pas comprendre la réaction de sa mère. «Je me suis enfui de la maison le lendemain pour me rendre chez mon père parce que je savais où je pouvais le trouver depuis tout ce temps. Ce n’est que par loyauté par rapport à ma mère que je n’avais jamais tenté jusqu’alors d’aller le voir même une fois », explique l’actrice de « Zombi Child » du réalisateur Bertrand Bonello qui a été sélectionné au festival de Cannes 2018.

 D’après ce qu’elle a raconté à la rédaction de Le Quotidien News, lors d’un long entretien, elle a été obligée de passer plusieurs semaines sans donner de ses nouvelles à sa mère, folle de rage, qui ignorait où elle était. « Elle  est allée chercher partout, sauf chez mon père, quand elle a appris que j’avais fugué, parce qu’elle ne pensait même pas une seconde que je pouvais lui infliger pareille chose », se remémore Mme Milfort qui, après son retour, comprendra les motifs de sa tendre mère. « A mon retour, je m’attendais à tout, je me suis préparée à ma mort », dit-elle avec un rire éclatant au téléphone. « Contre toute attente, elle m’a accueillie avec son humour habituel. Plus tard, elle a pris le soin de tout me raconter, de tout m’expliquer.  C’est la première fois de ma vie que j’ai pris parti et défendu ma mère », affirme-t-elle. Quelques mois plus tard, sa mère meurt. Katiana Milfort voit son univers basculer dans l’inconnu, tout  d’un coup.

Révélation choc d’une féministe aguerrie

Orpheline de sa mère, son héroïne et avec un père absent, Katiana Milfort voit converger vers elle des tourbillons de violentes bourrasques. Toutes les femmes de son petit monde féminin dans lequel elle a grandi, souhaitent obtenir la garde de sa petite sœur. « Toutes ces dames ne voyaient que le blé qu’elles pouvaient gagner de notre oncle pasteur qui était notre tuteur légal et qui vivait aux États-Unis, aux dépens de ma petite sœur. Elles ont toutes trouvé un prétexte pour ne pas m’héberger »,soupire l’actrice du long métrage, « Le mythe de la caverne », paru en 2016.

Finalement, sa marraine se porte volontaire pour les héberger. « Je serai toujours et toute ma vie reconnaissante envers ma marraine qui m’a offert un toit où dormir, en dépit du fait que c’est chez elle que j’ai vécu les pires désagréments de ma vie », concède Katiana qui subira chez cette dernière, pendant deux longues années, des actes de viol. « Je ne pouvais pas en parler à qui que ce soit. Qu’est-ce que j’allais dire, d’ailleurs ? C’était le fils le plus chéri de ma marraine. Qui m’aurait cru ? », s’interroge cette vaillante femme qui a dû supporter son bourreau de peur qu’il ne s’en prenne à sa petite sœur.

C’en est fait. Katiana Milfort se libère enfin du joug de son violeur et regagne la demeure de son père toujours absent parce qu’en fait c’est la belle-mère qui l’accueille. « Après quelque temps, j’ai senti le besoin d’en parler et je voulais tout raconter à mon père tandis que lui ne voulait point écouter », se souvient Mme Milfort, brisée sur le coup. « M pa bezwen konn anyen nan sa w ap di m la », la phrase choquante que lui a sortie son père. Elle s’en souvient encore. « J’étais bloquée. J’ai ressenti soudainement un vide en moi. Cet épisode m’a rongée de l’intérieur », témoigne l’actrice du court métrage « Laissez-les décider », qui ne pouvait se faire examiner par un psy a époque.

Elle aura vécu pendant longtemps avec cette peur…cette peur qui la stressait encore plus sur scène. « Il n’y avait qu’une chose que je craignais sur scène lors de mes spectacles, c’est de voir mon violeur dans la salle », confie Mme Milfort avec beaucoup de dégoût. Certes, Katiana Milfort n’oubliera jamais cette mésaventure, mais aujourd’hui elle arrive à surmonter courageusement sa phobie. Elle s’en sert aujourd’hui comme force pour  déployer sa puissance sur scène et autant dans sa réalité.

Vivre pour la scène

Il est de notoriété chez les amis du théâtre que Katiana Milfort est une comédienne qui  possède un don incroyable pour la scène.  Là, elle se découvre et se livre à un public  qui est aux anges. Elle enfile un à un ces personnages et les mènent à bon port. Le théâtre est en effet le meilleur moyen pour elle de s’exprimer,  de partager ses sentiments et de faire découvrir tous type d’horizon qui t’était jusqu’ici inconnu.

La comédienne découvre pour la première fois l’ambiance théâtrale chez les Frères salésiens de Pétion-ville GADOSA. Le destin lui ouvre les portes du ciel quand elle rencontre le célèbre Daniel Marcelin à la bibliothèque d’Auguste, qu’elle fréquentait souvent en compagnie de sa mère. Il faut croire qu’elle n’avait pas changé ses habitudes. « On était dans le même rayon et on n’avait d’yeux que pour le même bouquin. C’est ainsi qu’a eu lieu le premier contact », se rappelle Katiana Milfort, qui passera trois belles années au Petit conservatoire avant de se rendre en Corse et à Paris pour son stage.

« J’ai eu l’heureuse opportunité d’être formée par les meilleurs professeurs et les meilleurs pédagogues.  Ils ont su me transmettre à la fois leur savoir et leur pédagogie. Ainsi, je n’oublierai jamais mes débuts au Petit conservatoire », déclare-t-elle. Cette comédienne dans l’âme et le sang, a connu dans ce vaste et bel univers du théâtre des aventures fantastiques. Comme par exemple, la première fois au Festival Quatre chemins en 2008, où, sur scène, elle a joué nue et sauté  trois pages dans  texte en plein spectacle dans la pièce de  ‘’Le Retour’’. Elle parle de ses séances de répétition avec de fins connaisseurs du métier comme le metteur en scène belge d’origine italienne, Pietro Varraso , Jean rené Lemoine, le grand Billy Elucien qui est aussi directeur du festival de Conte, ou Michel Lemoine avec lequel elle répétait à la FOKAL,  et le fameux Guy Régis, entre autres. Elle pense également au Festival des Cannes 2019, à la Quinzaine des réalisateurs où le film « Zombi Child » réalisé par Bertrand Bonello, dans lequel elle incarne, comme actrice principale, une prêtresse du Vaudou. Sans oublier « l’Émergence », meilleur court-métrage franco-canadien 2017, dans lequel elle a joué.

Elle connaîtra également des moments regrettables sur scène, comme la fois où son micro-cravate l’a lâchée en plein spectacle. « C’est la raison pour laquelle j’ai un mauvais souvenir des micros-cravates. J’étais tranquille sur la scène, je performais  alors que le micro ne fonctionnait pas. J’ai dû m’arrêter un peu pour enlever le micro enfoui dans mon costume », se remémore Katiana. « J’étais cassée brusquement. J’ai repris le spectacle, mais ce n’était pas la forme », regrette-t-elle.

Dans sa filmographie, Katiana Milfort compte une dizaine de films. Citons parmi eux : le long métrage « Pluie d’espoir » (2003) dans lequel elle a tourné comme actrice et danseuse; le long métrage « Dimanche 4 janvier » (actrice) ; « Lakay se lakay » (2017) dont elle est actrice et la narratrice; « Impasse » (2018) ; « Zombi Child » ( cannes 2018) (actrice et narratrice) et « Zaho » qu’elle a réalisé en hommage à son ami Vladjimir Legagneur, le photojournaliste assassiné à Grand-ravine.

Katiana Milfort se dit satisfaite de son métier qu’elle exécute avec amour. Son rêve le plus cher est de tourner à travers un monde où les femmes soutiennent les femmes réellement, comme l’une des meilleures réalisatrices.

Statler LUCZAMA

Luczstadler96@gmail.com

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