Mauvaise entame !
3 min readLa date du premier janvier a une double signification pour le peuple haïtien. Il est le premier jour de l’an. Un jour qui clôt une année passée avec ses bons et ses mauvais cotés tout en ouvrant la voie à de nouvelles perspectives, de nouveaux projets et de nouveaux souhaits. Il marque également la date des festivités de l’Indépendance nationale. Prouesse accomplie dans le sang, grâce au courage et aux sacrifices des héros de 1803. Une journée de mémoire.
L’année 2021 a été tellement catastrophique. Plus d’un se sentirait plus à l’aise s’il pouvait refouler dans son inconscient les cauchemars qu’il a dû subir durant ces 365 jours écoulés. Les souhaits majoritairement formulés pour cette nouvelle année de 2022 prévoient déjà des jours difficiles pour le pays.
Les défis sont énormes. Qui pis est, tout doit passer par la résolution (en partie ou totale) de la crise politique qui a trop duré, exacerbée par l’assassinat de Jovenel Moïse. La crise qui n’a fait que décupler la misère déjà chronique, la faim, l’insécurité, le kidnapping, les querelles politiques, l’impunité, l’inconstitutionnalité, etc. La seule évidence qu’il y a sur cette année achevée, c’est le manque de volonté des leaders politiques d’œuvrer à la résolution du problème.
Au timon des affaires malgré les controverses, Ariel Henry affirme être au courant de ce qui l’attend. Il promet monts et merveilles, notamment de combattre le banditisme qu’il protège (référence : déclaration de Daniel Foote). Une promesse qui aurait dû soulager la population prise dans l’étau des gangs qui font tout pour la terroriser.
Le Chef de la Primature, Ariel Henry a entamé l’année par une forme de provocation qu’il pouvait éviter. Un déficit de maîtrise qui a mis en danger des vies, dont la sienne. Cette scène regrettable n’a pas fait honneur au pays, encore moins au PM qui montre son impuissance face aux hommes armés qui multiplient leurs implantations dans le pays. Jour de mémoire et de recueillement, la maladresse du premier citoyen du pays a fait couler du sang.
Célébrer la fête de l’Indépendance dans des affrontements entre autorités légales et civils armés, ne traduit en aucune manière le message de réconciliation prêché par M. Henry. Il ne donne aucune assurance non plus que le pays va prendre cette voie de la réconciliation inconditionnelle, pouvant mener à un retour à la paix, à la fin des conflits stériles à l’ordre démocratique, entre autres, tant nécessaire. Cette entame est malheureuse. Elle creuse davantage le fossé entre les protagonistes au lieu de les courtiser. En cette date où nos ancêtres ont prouvé à l’humanité que l’union est la plus grande des forces. M. Henry a une fois de plus hypothéqué sa chance de se montrer rassembleur. Il vient de rater une occasion supplémentaire de recoudre le tissu social déchiré. L’incontournable entente politique souhaitée, vraisemblablement, n’est pas pour demain.
Entretemps, les gangs gagnent en puissance. Ils répandent leurs germes mortels partout. Au cours des trois premiers jours de l’année, le pays a déjà recensé pas moins de 10 morts victimes de conflits. Huit se sont faits tués dans un conflit terrien à l’Arcahaie, 2 aux Gonaïves durant le passage du Premier Ministre, l’inspecteur Toussaint, lui, a été abattu par un gang, le premier janvier 2022. À Carrefour, un homme a blessé à l’arme blanche quatre personnes, dont un CASEC laissé pour mort, avant que la population ne le lynche et ne brûle son corps, etc. Massacre civil, impunité, conflit armé des gangs, violence politique : que des signes évidents qui annoncent une année encore plus dure.
Daniel Sévère