Report dans la mise en application du nouveau Code pénal : une décision saluée par plus d’un, dont des avocats et des religieux
5 min readLe gouvernement d’Ariel Henry, lors d’un conseil des ministres tenu le mercredi 22 juin, a reporté la mise en application du Code pénal pour deux ans. Si pour Me Darbenszky Gilbert, « les conditions n’étaient pas réunies pour l’application dudit code», pour l’ancien sénateur Jean Renel Sénatus, le report de cette mise en application du code pénal est une « victoire » . Quant au Pasteur Gregory Toussaint, il assure, bien qu’il applaudisse la décision, que le combat n’est pas terminé tant que le document ne sera pas révisé.
Le gouvernement d’Ariel Henry a reporté la mise en application du Code pénal tant controversé, dont la mise en application était prévue pour le 24 juin 2022. « Suite aux pressions de la société civile, des leaders religieux, des barreaux des 18 juridictions du pays qui l’ont dénoncé dès sa publication au journal Le Moniteur. Ce décret publié en l’absence d’un Parlement fonctionnel et dans un contexte de crise politique ne trouve pas la légitimité populaire, parce que le gouvernement Ariel Henry qui n’a pas de légitimité veut garder le pouvoir pendant longtemps», déclare le directeur exécutif de l’Ordre des Défenseurs des Droits Humains (ORDEDH), Me Darbenzky M. Gilbert lors d’une interview accordée au journal Le Quotidien News en soulignant que « ce code ne reflète pas la réalité d’aujourd’hui et c’est une copie des lois françaises ».
D’après Me Gilbert, le Code pénal c’est un code qui sanctionne les individus face à la société, il concerne les rapports entre l’individu et la société dans son ensemble. « Il punit les individus qui commettent des actes répréhensibles ou qui ont des comportements interdits par les lois votées par le législateur, le représentant de la société. Le Code pénal vise à faire respecter l’ordre public et à protéger la société. Il détermine les actes, comportements ou conduites antisociales qui constituent les infractions, et définit la réaction de la société, appelée sanction pénale ou peine, à ces manquements. La personne qui commet une infraction est appelée un délinquant. Les peines sont toujours suivies d’emprisonnement », précise-t-il au journal.
« Le projet de Code pénal de Jovenel Moïse, c’est un projet des pays impérialistes, il n’y a rien à voir avec la société, nos coutumes, la réalité où nous vivons. C’est pour cela que le gouvernement a mis en place une commission d’évaluation pour ce projet. Le Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) n’arrive pas à former les magistrats, les huissiers, les avocats avant la mise en application de ce code […] les conditions n’étaient pas réunies», a fait savoir Me Gilbert.
Le défenseur des Droits Humains plaide pour un autre Code pénal. « […] Il nous faut un Parlement fonctionnel où les élus seront les représentants directs du peuple qui pourront débattre sur la mise en place d’un nouveau code pénal […] Mais les dirigeants en place n’ont pas de légitimité pour engager la nation à travers cette prestigieuse décision», a-t-il ajouté.
« Art: 745. Le déni de justice ne saurait être sanctionné par l’emprisonnement » la justice est un service public, dit-il. « Ne pas rendre justice, sans motif valable, est une faute disciplinaire, non une faute pénale. La sanction appropriée ne saurait être une peine, mais plutôt une sanction disciplinaire contre le magistrat fautif », a-t-il fait remarquer. La majorité sexuelle et l’orientation sexuelle sont deux des points ayant suscité le plus de débats et de récriminations par rapport au nouveau Code pénal. «Le nouveau Code pénal comporte de nombreuses dispositions donnant lieu à confusions au sujet de l’âge de la majorité sexuelle, notamment les articles 277, 304, 384 », a-t-il souligné.
« L’article 17 de la Constitution qui a ramené l’âge matrimonial de l’homme et celui de la femme à 18 ans. Les juges, dit-il, recommandent « de fixer la majorité sexuelle de la femme ainsi que celle de l’homme à 18 ans ». « En dessous de cet âge, poursuit-il, la fille ou le garçon sera présumé ne pas avoir consenti à un rapport sexuel, ce qui permettrait de qualifier de viol la relation sexuelle entre un majeur et une personne en dessous de cet âge». Les articles « 265, 275, 277, 289, 970, 971, 221 et 226 portant respectivement sur l’amnistie et la réhabilitation constituent deux autres points faibles du Code pénal Jovenel Moise», d’après Me Darbenzky Michaelange Gilbert.
Réactions de l’ex Sénateur Jean Renel Sénatus
« Je salue la décision adoptée en Conseil des ministres de facto ayant trait au report du Code pénal. […] ce plan visant à tenir les valeurs morales et la dignité humaine ne passera pas», a écrit l’ancien Sénateur Jean Renel Sénatus sur son compte twitter.
Par ailleurs, l’ancien Commissaire du gouvernement à Port-au-Prince, Me Sénatus, insiste sur le fait que ce Code pénal doit être corrigé avant d’entrer en application, de manière à ce qu’il soit parfaitement adapté à la culture du peuple haïtien.
Les religieux aussi sont de la partie
Réagissant à la décision prise par le gouvernement haïtien sur le report de la mise en application du Code pénal, le Pasteur Gregory Toussaint a déclaré « que le combat n’est pas terminé tant que le document sera pas révisé ». « Le Code pénal ne peut pas entrer en vigueur dans l’état où il est, sans les révisions promises par l’ancien Président Jovenel Moïse […] le pays est confronté actuellement à toutes sortes de problèmes, la vie chère, l’insécurité, les kidnappings, un président assassiné qui ne trouve pas encore Justice, la publication de ce code est loin d’être l’urgence de l’heure», déclare le Pasteur Gregory Toussaint lors d’un service de prière dans le cadre de l’événement annuel « 40 jours de jeûne ». D’après le Pasteur, ce sont des « pratiques immorales comme l’inceste, la zoophilie, la prostitution des mineurs, l’interruption illégale de grossesse et bien d’autres » qui posent le plus de problèmes dans ce nouveau Code pénal.
Jackson Junior Rinvil