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Black-out en Haïti, toutes les grandes villes du pays sont plongées dans le noir

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L’énergie électrique en Haïti a toujours été un casse-tête pour tous les Gouvernements de ces dernières décennies. Dépendant principalement des sources d’énergie fossiles et carbonées, l’électricité se fait chaque jour de plus en plus rare dans le pays, au fur et à mesure que la grande crise sociale, économique et politique s’amplifie.

« La baisse du niveau du lac de Péligre à cause de la saison sèche, la crise du carburant aggravée par le contrôle des zones stratégiques par les gangs armés et des problèmes techniques d’ordre structurel nécessitant de grands investissements… »,  expliquerait, selon une Note récente de la Direction Générale de l’Electricité d’Haïti (Ed’H), le rationnement drastique de l’électricité au niveau de la région métropolitaine de Port-au-Prince surtout. L’institution serait empêchée de faire payer correctement ses abonnés. Les moyens sont donc faibles et,  en plus, la crise à laquelle fait face le pays n’épargne pas ce secteur.

Pour la Direction Générale qui dit être en train de mettre en œuvre « une stratégie de distribution rotative avec le minimum de courant électrique disponible, afin de pouvoir offrir même au rabais à ses abonnés une distribution d’énergie », la tâche est compliquée, et plusieurs grandes villes sont plongées dans le noir total. Aux Cayes, grand centre économique de la région Sud du pays, il n’y a pas eu d’électricité depuis le 14 août 2022. Par ailleurs, au Cap-Haïtien, métropole de la région Nord du pays, l’électricité n’est plus qu’un lointain souvenir.

« En ce qui concerne ma zone de résidence, dans la localité de Vertières, il n’y a plus d’électricité depuis plus de deux ans », déclare Sara, bientôt ingénieure agronome, et jeune entrepreneure au Cap-Haïtien. Pour Lovinsky, lui aussi natif du Cap-Haïtien, l’électricité et la ville du Cap dans la même phrase, est une aberration. « Quand il est question d’électricité, pas besoin de parler de la ville du Cap-Haïtien. La ville de Limonade a un peu d’électricité, même Quartier Morin n’en a pas. Même pas deux heures par jour. À l’époque où le Président Moïse parlait d’électricité 24 heures sur 24, le Cap avait un peu de courant, mais depuis qu’il est parti, on n’en a plus », a-t-il déclaré à la rédaction du journal Le Quotidien News.

Plus près de la grande centrale hydroélectrique de Péligre, la ville de Hinche, dans le Centre, est également plongée dans le noir. Mildred, Hincheloise, a dû recourir à une source d’énergie privée et renouvelable. « Je suis revenu à Hinche depuis deux semaines, et je n’ai  eu un peu d’électricité de l’Ed’H que deux fois, la nuit. Cette question d’électricité est un désastre. Chez moi, on a dû faire une installation de panneaux solaires pour répondre à nos besoins d’électricité, sinon on aurait beaucoup de problèmes », a-t-elle déclaré.

L’énergie solaire photovoltaïque prend peu à peu sa place dans les ménages haïtiens. Les rationnements de l’Ed’H ne suffisent pas à combler les besoins en énergie. « Depuis le mois de mai 2022 jusqu’à janvier 2023, la zone était plongée totalement dans le noir », raconte Line, en parlant de Cité-Militaire dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince. « Chaque propriétaire qui voulait combler ce vide a décidé de faire des installations d’énergie solaire chez eux, et ceux qui ne pouvaient pas ont été obligés d’économiser, soit 25 gourdes ou plus, tout dépendant de l’appareil qu’ils souhaitent recharger. Une situation des plus déplorables », raconte celle chez qui l’énergie solaire a remplacé l’Ed’H.

Dans le quartier, l’Ed’H a surpris tout le monde lors de la deuxième semaine du mois de Janvier 2023, mais cela n’a pas duré, ajoute-t-elle. « Nous avions pensé que tout était redevenu comme avant durant les années antérieures, […] mais elle n’a duré que deux ou trois jours sans coupures. À ce moment-là,  nous avons tous pensé que le problème était résolu mais ce fut un bonheur de courte durée, car aujourd’hui encore on fait face à une absence totale d’électricité depuis plusieurs semaines », explique-t-elle.

Sébastien qui habite le quartier de Pèlerin à Pétion-ville, se trouve obligé de payer des particuliers pour recharger son téléphone portable et son laptop, alors qu’avant, l’électricité était disponible 24 heures sur 24. « Autrefois, sous la Présidence de Jovenel Moïse, nous avions le courant à Pèlerin quasiment sans coupure, 24 heures par jour. Certains disaient que c’était parce que le Président habitait la zone. Et c’était peut-être vrai car tout de suite après sa mort, le rationnement a commencé pour nous, avec seulement quelques heures par nuit les jours de la semaine, et un peu plus le week-end. Au fil du temps, l’électricité s’est fait de plus en plus rare à Pèlerin, et en 2023 la zone est plongée complètement dans le noir. Ces deux dernières semaines, nous n’avons pas eu de courant. Nous sommes obligés de payer pour recharger nos appareils électroniques ».

De nombreux Chefs d’État et de Gouvernement ont promis de vouloir donner un coup de jeune à l’électricité en Haïti. Grande promesse de campagne de l’ex-Président assassiné Jovenel Moïse, son cheval de bataille, l’électrification complète du pays 24 heures sur 24 n’a jamais vu le jour. Aujourd’hui, limitée par l’action des gangs armés et la sécheresse, les marges de manœuvre de l’Ed’H sont étroites, et la population se démène comme elle peut pour satisfaire ses besoins en électricité, comme pour tant d’autres choses.

Clovesky André-Gérald PIERRE

cloveskypierre1@gmail.com

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