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« Ils veulent désormais prendre Belvil ou du moins faire pression afin d’inciter les habitants à partir », raconte une résidente

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L’insécurité qui sévit en Haïti s’étend à grand pas vers les beaux quartiers de la région métropolitaine de Port-au-Prince. Pétion-Ville, réputée pour héberger certains des plus aisés, est désormais le bastion d’un gang des plus dangereux du pays qui ne jure que par l’élargissement de son territoire. Le Quotidien News est allé à la rencontre  d’une résidente de Belvil requérant l’anonymat.

Les différents quartiers à Pétion-Ville subissent à tour de rôle de lourdes attaques du gang local. Aujourd’hui, son territoire s’étend sur presque toute la ville, encerclant presque totalement le centre de formation de la Police Nationale. Dans la nuit du samedi 28 au dimanche 29 janvier, les membres du gang « Kraze baryè » ont attaqué le sous-commissariat de Pernier – abandonné plus tôt dans la semaine par les policiers – et l’ont détruit.

Pas plus tard que le 10 janvier dernier, ce même gang avait attaqué et tué quatre policiers dans un guet-apens. Après plus d’une douzaine de morts dans les rangs de la police nationale en ce premier mois de 2023, des manifestations policières ont eu lieu, et cette dernière semaine, la présence policière s’est faite très rare dans la capitale et ses environs. La pression des gangs armés est de plus en plus forte, et les forces de police semblent diminuées.

Belvil ciblé

Après l’attaque contre le sous-commissariat de Pernier, ça a été au tour du quartier de Belvil, toujours en cette même nuit du 29 janvier. Cependant, face à une résistance des agents de sécurité qui gardent les entrées du quartier, les truands ont dû rebrousser chemin après avoir détruit une partie de la clôture. Les hypothèses semblent se multiplier quant à la raison de cette attaque qui n’est pas une première sur les beaux quartiers de Pétion-Ville. « Selon certaines sources, cela aurait rapport avec une maison que le chef de gang veut récupérer pour son avocat », explique une source habitant Belvil au journal Le Quotidien News.

Cependant, la velléité d’élargir leur territoire est flagrante, et reste l’explication la plus plausible. « C’est une question de pouvoir, une question d’imposition. Avec le semblant de sécurité qu’on a à Belvil à cause des barrières et des agents de sécurité qui gardent les guérites, s’ils arrivent à la prendre d’assaut, cela va leur donner plus de pouvoir, une plus large zone d’influence. D’autant plus que Belvil est réputée pour loger des riches, des bourgeois », a-t-elle expliqué, avant de rappeler que le gang n’est pas à son premier essai. « Peut-être ont-ils un projet de venir prendre la zone ou inciter les gens à partir. Mais ce qui est à noter, ce n’est pas la première fois, ça s’est déjà passé fin 2022, ils avaient cassé un mur, mais les habitants avaient riposté et placé des containers à la place ».

« Pour ce mur, maintenant, on n’a pas encore trouvé de solution. Un pont donnant accès à la zone via cet espace a été détruit, et des efforts sont consentis pour refaire le mur, malgré des attaques contre les ouvriers », explique-t-elle. Selon elle, cette semaine, des policiers ainsi qu’un blindé de la police patrouillent la nuit dans les environs, pour apporter un semblant de sécurité. Cependant, la peur semble s’est confortablement installée dans ces quartiers longtemps reconnus pour être paisibles. « Concernant l’état psychologique des habitants de Belvil, on essaye de tenir bien qu’il y a des maisons qui sont déjà vides, les propriétaires sont partis, soit pour l’étranger ou en province. Les gens sont terrorisés par cette situation, surtout ceux qui sont près de là où l’incident s’est passé ».

« Pour moi dans la maison, le premier soir, on a eu vraiment peur à cause des détonations incessantes et de la peur que la situation dégénère. Cette sensation d’inconnu rend la situation beaucoup plus inquiétante car on ne sait pas ce qu’est leur projet, ni quand ils vont attaquer avec force », raconte celle qui vient de vivre l’une de ses pires nuits.

Avec le sous-commissariat de Pernier abattu et celui de Vivy Mitchell qui est quasiment fermé, le gang a gagné en puissance ces derniers jours, limitant au maximum le déplacement dans ces quartiers. « On peut toujours se déplacer mais avec beaucoup de précautions car la peur terrorise tout le monde ».  « Il y a parfois des détonations, en ces temps il est préférable de rester chez soi car on ne sait jamais. Surtout il y a des habitants, dont moi, qui ont aperçu des projectiles sur le toit de la maison, d’autres dans leur salon », raconte l’habitante de Belvil au Quotidien News.

L’insécurité n’a désormais aucune frontière dans le pays qui ne peut plus fermement compter sur les forces de police locales, qui elles-mêmes en sont victimes. Tandis que la situation continue à s’envenimer, le Gouvernement poursuit ses parades auprès de la communauté internationale, en quête d’une aide militaire.

Clovesky André-Gérald PIERRE

cloveskypierre1@gmail.com

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