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Quel médiateur nous faudra-t-il ?

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Le départ pour l’exil de Jean Claude Duvalier, le 7 février 1986, a marqué la fin d’un long combat politique mené par le peuple haïtien contre un régime politique autocrate, caractérisé par la violence et la répression. Le 29 mars de l’année suivante, la nation haïtienne a décidé d’adopter une autre forme de gouvernance à travers une nouvelle Constitution. Celle de 1987.

Malgré cela, cette avancée, que les historiens appellent « la transition démocratique », ne peut se poursuivre qu’en dents de scie. En effet, ce régime qui consacre la pleine jouissance des droits fondamentaux de l’homme, peine à prendre racine en Haïti. Le non-respect des droits humains se multiplient au même rythme que les violations de la Loi. La Constitution, seule boussole du peuple, est systématiquement foulée au pied provoquant des crises à répétitions.

Cette transition aura du mal à se réaliser par le simple fait que les acteurs préfèrent faire la sourde oreille, plutôt que faire place à la légalité et au dialogue. Ils privilégient la division en lieu et place de la convergence des énergies  pour le développement et la reddition de comptes.

La crise sociopolitique perdure dans le pays. Elle s’est aggravée durant les derniers mois qui ont suivi l’assassinat du Président Jovenel Moïse. Chaque groupe impliqué dans la recherche d’une solution à cette embarrassante situation essaie de tirer le drap de son côté. Au lieu de se concentrer sur l’essentiel, les acteurs politiques adoptent des positions radicales et cherchent sans relâche à trouver des boucs émissaires.

L’expérience démocratique haïtienne durant ces trente dernières années se résume à un tableau sombre : des politiques qui mettent en avant leur mesquinerie et qui sont plus intéressés à défendre des miettes que de respecter et faire respecter la Loi. La  population haïtienne est unanime sur le fait, que dans l’état actuel de la crise, seul un consensus large et inclusif peut dénouer ce nœud gordien que les politiques ont minutieusement construit au cours des ans, mais les lignes ne bougent toujours pas. Au contraire, la situation ne fait qu’empirer.

Le pays désormais est géré comme un butin de guerre. Chaque acteur s’efforce de tirer son épingle du jeu.  Les politiciens font pulluler des accords, tous semblables sur le fond et ils se cachent derrière de fallacieux arguments pour faire passer le temps.

La réalisation des élections pour renouveler le personnel politique n’est plus une obligation en Haïti. Les acteurs politiques ont préféré la stratégie qui donne accès au pouvoir par d’autres moyens. Tout doit passer dorénavant par la négociation. C’est le crédo actuel. D’innombrables situations d’instabilité sont créées. C’est comme si la démocratie signifiait littéralement cohabitation politique.

Compte tenu de tout cela, le pays n’est pas à l’abri d’un chaos politique généralisé. L’opposition de l’ère de Jovenel n’avait pas voulu dialoguer malgré les diverses tentatives de l’administration d’alors et les efforts de la communauté internationale. À tout bout de champ, ils essaient de discréditer tous ceux qui oseraient faire un arbitrage. La « Passerelle » a échoué, les initiatives prises à la nonciature n’ont pas non plus donné de résultats, sans parler de la structure interreligieuse « Religion pour la paix » qui s’était portée volontaire  pour jouer le rôle du facilitateur.  Les acteurs avaient refusé son bon office. À présent, le pays est dans l’anarchie la plus totale.

Seul un accord global peut paraître comme la voie la plus raisonnable. Néanmoins, les protagonistes continuent dans leurs manœuvres dilatoires. Ils n’arrivent pas à s’entendre en raison de multiples divergences d’intérêts. Tous les voyants sont au rouge. La misère, le chômage, l’insécurité, la violation des droits humains, la mauvaise gouvernance, entre autres, atteignent leur paroxysme. Personne pour concilier les deux bouts.

Paradoxalement, l’exécutif, qui n’arrive pas à panser ses plaies, qui peine à préserver les droits de ses citoyens terrorisés sur leur propre territoire, ce gouvernement, qui n’arrive pas à parler à sa propre population en vue de trouver un consensus pour faire revenir le calme, se donne le profil (perdu depuis plus de deux cents ans) de défenseur de la liberté, de la souveraineté et des droits de l’homme en appelant les concernés (Russes et Ukrainiens) à agir avec retenue.

Daniel SÉVÈRE

danielsevere1984@gmail.com

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