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Sanctions internationales contre des personnalités : Où est passée la justice haïtienne ?

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La crise haïtienne continue de s’aggraver chaque jour, sans l’ombre d’un début d’apaisement. Malgré l’absence de manifestations ou de blocus civils dans les rues, les Autorités n’arrivent pas à redonner vie au pays. Entre-temps, citoyens et organisations de la société civile ne cessent de réclamer une intervention de la justice haïtienne ou toute autre forme de prise en compte des éléments présentés dans le cadre des sanctions internationales prises contre des personnalités haïtiennes.

La communauté internationale s’intéresse plus que jamais aux affaires internes du pays. Depuis la Résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU  sanctionnant des personnalités haïtiennes nommément désignées, le Canada et les États-Unis ne cessent d’ajouter de nouveaux noms aux listes des individus ciblés comme ayant une part de responsabilité active dans la crise économique et sécuritaire du pays. Participation ou soutien aux actions criminelles et à la violence des gangs armés, aux trafics illicites, détournement de l’aide humanitaire dans le pays, sont entre autres les faits reprochés à ces personnalités.

« Les infractions pour lesquelles les sanctions sont prises contre certaines personnalités du monde politique sont des infractions graves », indique la Fondation Je Klere (FJKL) dans un rapport publié le 28 novembre 2022 intitulé : Sanctions ciblées contre d’anciens et actuels dirigeants haïtiens : La justice haïtienne sera-t-elle à la hauteur  du rendez-vous historique ? Mise au point de la Fondasyon Je Klere (FJKL) ». « Les infractions reprochées aux personnes sanctionnées sont des infractions prévues et punies de trois à quinze ans de prison et les infractions sous-jacentes sont punies du même ordre », poursuit la FJKL.

Impacts sur le plan financier, commercial et bancaire

Selon la FJKL, les sanctions américaines et canadiennes à l’encontre des personnalités haïtiennes doivent être également appliquées sur le territoire haïtien, en vertu de la loi du 11 novembre 2013 sanctionnant le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Bien que la loi ait fait mention expressément du Conseil de Sécurité de l’ONU, la FJKL croit que les institutions financières haïtiennes devraient prendre en compte les sanctions bilatérales, en attendant la liste du Conseil de Sécurité.

« En attendant la publication de la liste du Conseil de Sécurité, les institutions financières peuvent-elles ignorer les sanctions américaines et canadiennes ? La réponse est non. Pourquoi ? La loi sur le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme prévoit l’obligation de vigilance et la nécessité de prendre des mesures préventives pour les institutions financières concernant toute relation d’affaires avec leurs clients », soutient la FJKL dans son rapport.

« Aucune banque en Haïti ne peut prétendre ignorer les informations publiquement disponibles sur les personnes sanctionnées par les USA et le Canada et prendre le risque de maintenir des relations d’affaires avec ces personnes et exposer la banque à des sanctions de la part de banques correspondantes. Elles devront, au moins, fermer les comptes de toutes ces personnes sans avoir à justifier cette mesure préventive et leur restituer leur argent par chèque de direction », poursuit la Fondasyon Je Klere.

Pour l’organisation, ces sanctions devraient également être prises en compte lors des prochaines joutes électorales, afin de crédibiliser encore plus la fragile entreprise démocratique dans le pays. « Le prochain décret électoral devra prévoir une disposition pour écarter des prochaines compétitions électorales les personnes sanctionnées pour des infractions graves. L’offre politique sera probablement plus crédible ».

Ariel Henry veut une justice qui joue son rôle

Bien qu’il y ait au sein du  Gouvernement et dans d’autres institutions du pays des dignitaires ciblés par les sanctions, les actions de l’État sont encore à attendre dans ce dossier. Par ailleurs, dans un tweet du 22 novembre, l’actuel locataire de la Primature a appelé la justice haïtienne à jouer son rôle. « Il nous faut une justice qui puisse changer d’image et qui joue son véritable rôle. Car, elle demeure un acteur important dans la production de la sécurité, et un acteur de premier plan dans le combat contre l’impunité qui détruit le pays », a-t-il publié, avant d’ajouter que la justice « doit être courageuse et prête aux sacrifices pour sauver la République ».

Plus tard, ce vendredi 2 novembre, à l’occasion du 18e anniversaire de la création de la Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP), le Premier Ministre  a reconnu la faiblesse des institutions du pays et l’image négative projetée vers l’extérieur. « Il faut reconnaître que nous nous trouvons dans un carrefour où ce qui se passe chez nous est scruté à la loupe, parce qu’au fil du temps, nous avons perdu la confiance de beaucoup d’institutions. », a-t-il indiqué dans un Tweet en marge de l’événement. Le pays perd en prestige chaque jour un peu plus.

Les autorités reconnaissent les difficultés auxquelles  fait face le pays, mais les réactions manquent encore à l’appel.

Clovesky André-Gérald PIERRE

cloveskypierre1@gmail.com

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