lun. Avr 29th, 2024

Le Quotidien News

L'actualité en continue

Entre les déportations et les mouvements de protestation, un fossé se creuse entre Haïti et la République Dominicaine

3 min read

Les tensions ne cessent d’augmenter entre les deux Républiques voisines. Avec plus de 96 000 Haïtiens rapatriés en moins d’une année, le Gouvernement dominicain mène une politique agressive contre les migrants haïtiens, et face à la passivité du Gouvernement haïtien, des citoyens sont de plus en plus enclins à imposer un blocus civil dans les différents points frontaliers officiels.

Après les blocus à Ouanaminthe la semaine dernière où des citoyens avaient entravé les activités commerciales binationales, un groupe de manifestants dans la commune de Belladère dans le Département du Centre  ont, en signe de protestation contre les déportations massives,  bloqué le point frontalier officiel de la ville avec la province de Elías Piñas en République Dominicaine ce lundi 28 novembre 2022. Le blocus citoyen issu des mouvements de « peyi lòk » est devenu, depuis plus de quatre ans, un véritable levier lors des mouvements de protestation dans le pays.

« Sur 350 kms de frontière avec la République Dominicaine il y a 6 points de passage. Pour nous faire respecter comme dignes fils de Dessalines par les Dominicains, bloquons ces points, Dans le même temps, mettons en place un fonds de solidarité pour aider financièrement nos frères rapatriés », a proposé l’économiste haïtien Eddy Labossière dans un tweet ce vendredi 29 novembre 2022, en marge d’une marche citoyenne à Port-au-Prince.

Participant à cette marche, l’économiste et dirigeant politique Camille Chalmers a exprimé son indignation face à la situation en République Dominicaine. « Nous sommes debout pour exprimer notre indignation face à ce qui se passe en Haïti, pour dénoncer le Gouvernement dominicain ainsi que le Gouvernement haïtien et les classes dominantes, qui ne défendent pas le pays et les travailleurs haïtiens ». Les voix ne cessent de s’élever contre les déportations massives de la République Dominicaine.

Dans un reportage de la chaine Al-Jazeera ce 28 novembre, William Charpentier, coordonnateur de l’Office National des Migrations et des Réfugiés Dominicains, dénonce l’injustice de la politique migratoire dominicaine. « Il y a des expulsions massives qui ne sont pas des cas isolés. Il n’y a pas de procédure officielle. Il y a des enfants avec des papiers en règle, d’autres ont juste des visas. C’est juste énorme et c’est un scandale. Mêmes les femmes enceintes sont renvoyées en Haïti alors que la loi l’interdit », a-t-il déclaré.

De son côté, le Gouvernement haïtien annonce avoir entrepris des efforts diplomatiques en vue d’établir le contact avec la République Dominicaine, en passant des instructions au Chargé d’Affaires d’Haïti afin qu’il sollicite audience auprès de la Chancellerie Dominicaine. ​« La requête haïtienne a été agréée dans un délai raisonnable et a permis au Chargé d’Affaires de transmettre aux Autorités dominicaines les préoccupations du Gouvernement haïtien parmi lesquelles : le respect du Protocole signé en 1999 sur les rapatriements, la question troublante des enfants mineurs déportés sans leurs parents, la régularisation du statut des étudiants et le commerce parallèle des visas », a fait savoir le Ministère de la Communication dans une note le 29 novembre.

Toujours selon cette note, le représentant haïtien a souligné, au cours de cette rencontre, que les agissements dominicains contribuaient à « détériorer les relations entre les deux pays et mettaient à mal la coopération nécessaire dans plusieurs domaines ». Le Ministère des Affaires Étrangères et des Cultes (MAEC) entend ne pas ménagers ses efforts dans ce dossier. « Le MAEC reste saisi de la question et ne négligera aucun effort diplomatique pour que soit respecté le Protocole de 1999 sur les rapatriements ». D’un autre côté, le pouvoir dominicain dit être dans ses bons droits et entend poursuivre ses opérations de rapatriements des Haïtiens en situation irrégulière, malgré les recommandations de la communauté internationale et de l’Organisation des Nations Unies.

Clovesky André-Gérald PIERRE

cloveskypierre1@gmail.com

Laisser un commentaire